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Alexandrine, cette étrange rencontre
6 janvier 2005

Le masque tombe

Ce matin une légère angoisse m’étreint en arrivant au bureau. Ça fait une semaine que la traite a repris le travail et la tension qui règne avec la traite me pèse et ça ne peut pas durer. Il n’est pas possible de bosser sereinement dans cette ambiance. Elle ne dit ni bonjour ni au revoir, elle ne fait rien de sa journée, ne demande rien.

En prenant le métro, je cherche comment crever l’abcès. Malgré tout je suis assez guillerette, mon directeur reprend le travail aujourd’hui.

Depuis ma nouvelle affectation, je mange très souvent avec monsieur Brandon. Avec tact, j’ai fait remarquer à Marie, qu'il ne m'était plus possible de déjeuner au self avec elle ou les filles, lui expliquant, que cela ne nous empêchera pas de temps à autres de manger ensemble à notre petit restaurant chez les normands.

De par mes propos, je lui fais bien entendre que ma nouvelle position ne me permet pas d’être l’ancienne Alex.

D’un autre côté, pour l’instant je ne veux pas me séparer d’elle, je cherche le moyen de lui faire cracher le morceau.

Je n’arrive pas à croire que ce soit Philippe qui ait fait ce coup tordu, pour moi c’est elle et je n’en démords pas. Elle savait que je quitterais Jocelyn en découvrant une trahison, mais elle a oublié mes parents, papé et mamé pour nous inviter ensemble à Noël, et misant sur une réconciliation entre Joss et moi.

Pendant deux jours, j’ai lu et relu mon dossier, je veux qu’il soit nickel. Je ne veux pas que monsieur Brandon trouve une faille. Je suis sûre de moi, mes idées tiennent la route.

Je n’ai pratiquement pas levé les yeux de mon travail. Toutes mes notes sont au propre, claires et vérifiées, soit par des textes de lois, soit par les conventions de l’entreprise. Plus qu’à présenter mon projet à monsieur Brandon, mais avant j’ai plus urgent à faire. J’envoie un mail à mon directeur, lui souhaitant bon retour, et lui promets de descendre avant déjeuner avec mon plan de restructuration.

Le téléphone me surprend, alors que j’appuie sur envoyer.

….. Meilleurs vœux Alexandrine.

Je ris. …… Alors vous m’avez abandonnée !

A son tour, mon directeur rit doucement ……. Hum, huit jours ! Je vois que vous aviez pris aussi quelques jours.

….. Bah oui, vous n’êtes pas là, je ne suis pas là, un bras droit sans le gauche, ne fait rien de bon Monsieur !

….. Où en êtes-vous dans la restructuration ?

….. Je vous ai envoyé un mail. Je peaufine et promis je descends avant midi.

…… Bien ! A tout à l’heure.

Ma décision est prise. Je fais un café et appelle Marie par téléphone.

  .... Oui ? 

  ... Tu peux venir me voir ? 

  ... Oui.

Elle frappe à la porte de communication, que je tiens fermée. Je lui dis d'entrer.
Marie ... Oui ? 

Elle reste debout, le visage fermé, je l'invite à s'assoir. Et me tournant vers la nouvelle cafetière, je lui dis .........Regarde !

Elle suit mon regard et voit ma petite installation.  

….. Oui et ?

......... Comme tu ne te décidais à aller acheter une cafetière, je m'en suis occupée.
......... Je n'étais pas très sûre que tu le veuilles toujours. 

….... Ah bon, parce que je suis dans ce fauteuil, je n'ai pas le droit de boire le café ?

Je ne me laisse pas déstabiliser par son agressivité. Depuis que je suis partie, en novembre et que je n'ai rien voulu lui dire, elle me bat froid. Répond du bout des lèvres ou pas du tout. Je vais l’acculer et lui faire avouer sa trahison, ensuite j’aviserai.

......... Bon Marie que se passe-t-il ? 

....... Rien pourquoi ? 

........ Il n'y a rien, Phil et toi ne me causez plus, vous m'ignorez totalement chez mes parents. Ici tu fais la gueule, tu ne viens même pas me voir, tu n’en glandes pas une !

………Je fais mon boulot.
J’ai envie de rire, je me demande bien ce qu’elle fait. …........ Ah bon parce qu'avant tu ne le faisais pas ? 

......... Ça n'a rien à voir. Tu es ma responsable directe.
....... Et avant non ? 

........ Tu n'étais pas cheffe de service, tu n'avais pas les mêmes fonctions.
......... Oui et alors ? Je ne suis plus la même ? J'ai pris la grosse tête ? Je te prends de haut ? 

......... Pas trop pour l'instant.

......... Comment ça pas trop ? 

........ Tu as quand même mis une certaine distance entre nous.

........ Non Marie, je n'ai mis aucune distance, simplement en prenant mon poste j'avais beaucoup de boulot. Tu crois quoi ? Que je fais des mots croisés ? Tu as certainement plus le temps que moi.

........ Je ne sais pas.

....... Tu ne sais pas quoi ? Marie tu sais qu'on va crever l'abcès, alors autant dire tout de suite ce qui ne va pas.
....... Que veux-tu que je te dise ? Tu as disparue pratiquement un mois sans rien dire à personne, sans me parler.

........ Mais je t'ai dit ou j'étais quand tu m'as demandé !

........ Tu n'étais pas chez tes parents !
........ Comment ça je n'étais pas chez mes parents ? 

........ Ils n'étaient pas au courant, tu ne leur as même pas demandé les clés de leur maison.
....... Ah oui, et Madame Pougeot elle n'a pas les clés ? 
Sa tête change, elle n'avait pas entrevue cette possibilité, et moi avec un aplomb terrible, mentant effrontément sans aucune honte. J'ai même le toupet de lui sourire.
........ Nous n’avons pas pensé à la personne qui s'occupe de la maison de tes parents.

Je ne relève pas le ‘’nous’’ ............ Alors tu vois, tu me condamnes, tu me traites de menteuse, sans réfléchir. Crois-tu que je t'aurai raconté des conneries ?

....... Désolée.
En riant, je lui réponds ....... Bah j'espère bien !
Je me lève sers deux cafés, je mets du sucre et pose une tasse face à Marie, l'autre je la garde en main, et me rassois dans mon fauteuil. Je veux être en face d’elle, surveiller son visage. Savoir si elle ment, si elle déguise la vérité

Tout en remuant le sucre, je lui demande ce qu'il y a d'autre.

Elle prend le temps de boire son café en soufflant dessus pour le refroidir, ou plutôt pour se donner une contenance. Je sais qu'elle a d'autres choses à me dire, et je pense que cela doit être difficile. Mais je ne l’aiderai pas.

Marie repose sa tasse et lève les yeux vers moi. Pâlotte, elle laisse échapper un profond soupir. Je la pousse dans ses retranchements.
.... Allez Marie, dis-moi sinon nous ne nous en sortirons pas, et j’en ai marre de cette situation, ça ne peut plus durer

…… Tu es retourné avec Jocelyn ?

…… Oui !

...... Je peux te demander ce qui s'est passé pour que tu le quittes et ne donnes plus de nouvelles à personne ? 

........ Oui tu peux me demander, mais vais-je répondre ? Tu sais ce qui touche ma vie avec lui, ne regarde pas les autres.  De plus je te sais au courant !

........ Pourquoi nous en sommes là Alex ? Qu'est-ce qui a causé cette déchirure dans notre amitié ? Avec tout ce que nous avons vécu ensemble ? 

......... Je vais te le dire Marie, mais ne te vexe pas. Je sais ce qui s'est modifié dans nos relations. Je me suis aperçue que tu donnais systématiquement raison à Jocelyn quand je te parlais de nos problèmes.
Marie me coupe la parole, et se défend avec véhémence, me traitant d'injuste. Je lui rafraichi la mémoire.
Je la regarde bien droit dans les yeux. Je veux en finir une bonne fois pour toute. Je vais lui dire tout ce que j’ai sur la paillasse, lui montrer qu’elle ne m’a aidé en rien, et qu’elle m’a plutôt enfoncée, à cause d’elle j’ai ramassé des roustes

........ Quand je t'ai dit que je ne voulais pas d'enfant tout de suite, qu'as-tu dis ? Mais si, le mariage c'est pour avoir des enfants. Je venais de te préciser que Joss m'a demandé un môme le lendemain matin pile poil du mariage, alors que je relevais d’une profonde dépression. Tu ne m'as pas dit, bah oui attendez un peu, parlez-en.  Non tu as dit bah oui pourquoi attendre ! C’est une façon de dire je suis ton amie, que d’abonder dans son sens en me laissant avec mes doutes ?

...... Disons que je partais du principe que cela faisait un an que vous étiez ensemble.
....... Exactement les paroles de Joss, étrange ! Quand je te disais qu'il me dérouillait, tu répondais quoi ?  Bah oui mais tu lui parles mal, tu l'exaspères. Mais lui il ne m'exaspérait pas pour que je lui parle comme ça ? Bah non je rentrais le soir et sans raison, je le traitais de connard.  
......... Je t'ai expliqué pourquoi il ne supporte pas les insultes.
....... Toujours ok, pas de problème. Et quand je te disais qu'il me prenait de force, que je me défendais avec des mots, donc il me dérouillait que m'as-tu dit ? Pourquoi ? Tu n’aimes pas faire l’amour avec lui ? Vois-tu Marie, c'est tout ça qui a fait que je ne te racontais plus rien. Puisque systématiquement il avait raison. Je n'avais donc aucun motif pour pleurer sur ton épaule.

....... Je ne sais pas quoi te dire. Ce n'était pas le but.
........ Ce n'était pas le but, mais le résultat est là. Et c'est ça qui nous a séparées. Ce n'est pas un manque de confiance, juste que je ne trouve plus la nécessité de te raconter nos différends puisque j'ai tort.

Marie ne dit rien, je la sens troublée par ce que je viens de dire, elle sait que je l’ai percé à jour.  

.... Notre amitié n'a pas changé Marie, seule la vie nous a changées. Je ne suis plus ta copine de travail, et de plus je ne te prends plus pour un bureau des pleurs. Mais on peut tout à fait continuer à parler de tout de rien. On peut continuer quand je peux, à aller manger au resto ensemble. On peut comme avant se taper une journée solde ou autre. Rien de ça n'est changé.

...... Pour toi non, mais la donne va changer quand même !

....... Non Marie, la donne ne change pas. Si j'ai demandé à ce que tu me suives, c'est parce que tu es encore mon amie

Elle plisse les yeux comme pour retenir une larme. J’ai envie de rire, elle fait celle qui renifle, prête à fondre en larmes. ‘’Bien joué, mais tu ne m’auras pas avec ton cinoche’’

Je rentre dans son jeu. De mon tiroir de bureau je lui sors la boite de mouchoirs en papier, qu’elle ignore.

…… Il ne faut pas pleurer Marie, on dirait le monde à l'envers, c'est moi d'habitude qui pleure, et toi qui me console.

J’essaie de détendre l’atmosphère, je veux la mettre en confiance.

J’allume une cigarette, et sans lui tendre mon paquet, je le pousse vers elle. Tout en rejetant la fumée, je poursuis. Je ne vais certes pas m’arrêter là ! Je m’en tape de la suite, de ce qui se passera, je n’ai rien à perdre, plus rien à perdre.

......... Pourquoi avoir vendu votre maison Marie ? Tu peux me dire ?

..... Ce n’est pas moi, je ne suis pas seule !

.... Tu ne pouvais pas t’opposer, Philippe n’est pas obtus. Tu espérais quoi ? Que nous fassions ménage à quatre dans la nôtre ?

Elle me regarde, les yeux pleins d’animosité ...... Que vas-tu imaginer ?

..... Je n’imagine rien, j’observe et je constate.

..... Alexandrine, tu divagues ou quoi ?  Philippe est mon mari

..... Combien de temps que vous êtes mariés ? Que tu te tapes le même mec ? Celui qui ne sort pas de votre routine, qui ne t’emmène jamais au resto ? Alors que le mec de ta soi-disant amie sort sa femme tous les week-ends ?

...... Je crois que nous n’avons plus rien en commun. C’est dommage que tu aies tant changée, tu viens de briser le dernier fil de notre amitié

Je la regarde et souris ironiquement ......... Vider son cœur, essayer de comprendre, tout dire à son amie, c’est briser cette amitié ? Il faut donc faire l’hypocrite, ne rien dire, faire semblant ? Fermer les yeux sur ce qui se passe ?

..... Ce n’est pas ce que je dis !

.... Marie, j’essaie simplement de comprendre certaines choses. C’est vous, vous trois qui m’avez rendu comme je suis aujourd’hui. Jocelyn avec son désir de me formater comme une vraie Gaussien de la Maleverne, toi avec tous tes sous-entendus ! Le beau, le grand Jocelyn qui a toujours raison, qui ne fait jamais d’erreur, et pour finir Philippe me bourrant la tronche de baffes, tout un après-midi, cette idée venait de qui ? De toi ? De quel droit a-t-il porté la main sur moi ?

..... Nous avions parlé en voiture, il m’avait dit qu’il allait te réveiller, et j’ai approuvé, mais je ne pensais pas qu’il allait lever la main sur toi.

.... As-tu fait quelque chose pour l’arrêter ?

Elle tire sur sa cigarette sans répondre

..... Vois-tu Marie, le contraire serait arrivé, je me serais mise entre Jocelyn et toi, je n’aurais pas accepté, mais toi, tu n’as pas levé le petit doigt !

..... Que voulais-tu que je fasse ?

..... Bah rien à part regarder ton amie se faire tabasser par un connard ! Je vais te dire Marie, vous ne connaissez pas Jocelyn une personne, une seule et unique le connait mieux que quiconque, sa sœur ! Elle sait, elle qui il est, comment il peut agir et réagir ! Vous, vous ne connaissez que l’image qu’il donne !

..... Oui enfin je te ferais remarquer qu’il y a pratiquement vingt ans que Philippe connait son pote !

..... Et nous ça fait combien ? Quinze ans qu’on pensait se connaître !

Je rallume une cigarette, je sens la mauvaise humeur arriver, devant tant de mauvaise foi. J’essaie de me calmer, j’aspire une grande bouffée de ma clope. Elle relève la tête, nos regards se croisent, le sien n’est pas bienveillant.

..... Je peux te poser une question ? Tu répondras en toute sincérité ?

Je souris .... Bien sûr, si ce n’est pas indiscret !

….. Tu es retournée avec Jocelyn ?

….. Avec Jocelyn et mon fils oui !

..... Pourquoi es-tu revenue ? Que comptes-tu faire ?

Je reste comme une conne, stupéfaite de sa question. Je m’attendais à tout sauf à ça.

........ Pourquoi cette question Marie ? Tu as des vues sur Jocelyn ? Mon départ t’arrangeait ?

...... Ne sois pas ridicule !

..... Marie, je ne suis pas aussi abrutie que tu peux penser. Depuis le jour où tu m’as dit être jalouse de moi, j’ai compris qu’en fait tu es amoureuse de Jocelyn.

...... Mais non, tu dis n’importe quoi !

..... Si Marie ! Alors tu n’es peut-être pas amoureuse de Jocelyn, mais tu es amoureuse de l’homme qu’il représente aux yeux de tous.

Elle hausse les épaules .... Mais non ...
Je ne la laisse pas terminer........ Si Marie, et j’ai raison, reconnais-le. Tu es envieuse de mon train de vie, tu me l’as avoué toi-même. Tu es amoureuse de l’homme de son charisme, de son autorité naturelle, de sa beauté. De tout ce qui fait mon mari. Le tien est si fade à côté.

Nerveusement elle prend une cigarette dans mon paquet tout en maugréant ………. Que vas-tu imaginer. Tu n’as pas toute ta raison !

Je l’accule, elle ne sait plus comment s’en sortir. Et je n’ai pas fini !

Le plus calmement possible je pose ma question. ........... A mon tour, je peux te poser une question ?

.... Vas-y, je ne suis plus à ça près !

..... Marie, pourquoi avoir fait des pieds et des mains, pour être la marraine de mon fils ?

..... Il me semblait que ça coulait de source non ?

….... Qu’est-ce qui coulait de source ? Philippe est parrain de Choupette, je ne voyais pas la nécessité de taper encore dans votre couple

….... Etant ta meilleure amie, je pensais que c’était une logique.

….... Ah ! Donc ta logique est qu’une fois que tu as eu la certitude d’être la marraine, tu ne t’es absolument pas occupée du petit ! C’est ta conception de voir les choses ?

..... Tu voulais que je fasse quoi ?

..... Je ne sais pas, me demander de ses nouvelles par exemple. Demander à le voir quand vous veniez. L’habiller et être avec lui, le jour de son baptême, tu en veux encore ?

Irritée, elle répond d’une voix sèche ........ Des nouvelles j’en avais par Joss, et au baptême tu faisais la tête, reconnais que ma position était difficile.

…...... Tu te fous de ma gueule ? Au baptême, tout le monde s’est étonné de voir le peu d’implication que tu avais. C’est mamé qui t’a mis presque de force le môme dans les bras. Tu as tiré une gueule de dix pieds de long

...... Tu ne me parlais pas, tu étais tout le temps avec ta belle-sœur.

…..... Ah, mais oui c’est de ma faute ! Donc je comprends l’engueulade qui a suivi avec Jocelyn, je te la dois, tu es allée dégueuler sur son épaule que je te faisais la gueule ! Alors excuse-moi du peu, mais tout le monde peut certifier, affirmer, et même confirmer que plusieurs fois je suis venue te demander comment tu allais !

Je la toise en colère et avant qu’elle ouvre la bouche je termine ma pensée. ..... Donc comme nous sommes en froid, mon fils va se retrouver sans marraine ! Puisque tu vas aller pleurnicher à son père notre conversation, et tu mettras fin à nos relations !

..... Mais non, pourquoi tu dis ça ?

..... A Noël, as-tu pris une seule fois le petit ? Au fait lui as-tu offert un cadeau pour mettre à son premier sapin ?

Elle devient écarlate et ne réponds pas.

Je deviens ironique ......... Vois-tu son parrain a fait livrer une chaise haute !

..... Nous n’en avons pas parlé avec Jocelyn, je ne savais pas quoi lui offrir, il ne manque de rien.

Ironique je souris …..... Ah ! Parce qu’il te faut l’autorisation de mon mari ? Le tien ne peut pas prendre la décision ? Vous ne pouvez pas acheter ne serait-ce qu’une bricole ? Vois-tu si ce n’avait été cette rouste que j’ai reçue, pour toi, à cause de toi, j’aurai tenu tête à Jocelyn et tu n’aurais jamais été la marraine ! Parce que s’il doit attendre après sa marraine, il n’est pas près d’avoir ne serait-ce qu’une fringue !

….... Je sais, que tu t’es opposée, j’ai voulu me retirer, c’est toi qui as objecté

…… Opposée à quoi ?

….. A ce que je sois la marraine

Je hausse les épaules en souriant ......... Hé oui encore moi. Décidément, je ne fais rien de bien. Il n’y a qu’au boulot qu’on reconnait mes talents. C’est toujours ça hein !

Et là je lui assène le coup de grâce ...... Je vais te dire pourquoi tu as anticipé auprès de Joss pour être marraine, alors que je t’avais dit que je voulais Choupette ! C’est tout simplement pour me couper l’herbe sous le pied, et d’une pierre deux coups, tu te rapprochais un peu plus de Jocelyn. Tu lui aurais montré que non seulement tu es la femme idéale, que tu aimeras ce petit, pas comme sa mère qui l’a rejeté à sa naissance !

...... Je te plains Alex, je ne sais pas ce que tu t’es mis en tête, mais tu ne vas pas bien !

J’esquive sa réponse et lui sors ma dernière carte. Je veux en finir au plus vite

 ……. J’ai compris que tu n’avais pas de vie avec ton connard, et que tu t’intéresses de près à la mienne, le soir avec ton mec vous vous gaussez sur mon dos, le rapport est fait à la virgule près ! Le lendemain votre pote est au courant de tout, du moindre geste, la moindre parole que j’ai pu dire ou faire. Et c’est pour ça que tu étais emmerdée quand je ne te disais rien !

….. Tu crois qu’avec Philippe on n’a pas autre chose à faire ?

….. Non Marie, vous n’avez pas autre chose à faire. Ta vie est tellement insipide que tu es devenue cette envieuse.

Elle secoue la tête, ses yeux lancent des éclairs, elle est pâle. Je ne m’arrête pas.

….. Dis-moi Marie, explique-moi comment Joss avec son entreprise à gérer et tous les soucis que ça lui donne peut-il avoir à l’esprit que j’ai passé une échographie sans lui ? Tu crois vraiment qu’il n’a que ça à penser ?

…… Tu le prends pour un niais ?

….. Non Marie c’est toi qui me prends pour une niaise. On parle écho, et hop le lendemain soir il m’en met plein la gueule, et refuse d’assister à la deuxième !

….. C’est un concours de circonstance

Je la regarde, me retiens de ne pas lui sauter à la gorge. Hargneuse je lui balance

 ……… Ah un concours de circonstance, et comment es-tu au courant de ça ?

Elle se trouble. ….….. C’est toi qui en as parlé

….. Non Marie, je ne t’en ai pas parlé. Vous avez peut-être de la mémoire, mais moi aussi, et je peux te donner des centaines d’exemples comme ça.

…… Tu as la mémoire sélective !

Je ne réponds pas, regarde l’heure, nous avons discuté pratiquement toute la matinée, je lance comme à regret mais je me sens obligée, parce que je sais qu’elle ne m’a pas tout dit

...... Non pas du tout !  Allez, viens on va bouffer ! 

Elle me regarde sans savoir si c’est du lard ou du cochon ....... Tu ne réponds pas à mes questions, tu m’accuses de je ne sais quoi ! Je ne vois pas l’utilité de manger ensemble ni de poursuivre

J’éclate de rire, pas pour me moquer d’elle, mais là franchement elle m’amuse trop !

......... Comment ça je ne réponds pas à tes questions ? Tu réponds aux miennes ?

........ Oui je t’ai répondu avec franchise, ce n’est pas ton cas !

…. Alors pourquoi la vente de ta maison, pour être dans la nôtre en même temps que nous, pour minauder devant Joss ?

….. N’importe quoi ! Simplement ils ont trouvé inutile d’avoir une maison à deux pas l’un de l’autre

….. Donc, vous devriez venir habiter à l’appart aussi, inutile d’en payer deux

Elle hausse les épaules …… Ne sois pas ridicule.

..... Oui c’est ça, je suis ridicule. Bon dis-moi à quelle question je n’ai pas répondu ?

...... Pourquoi es-tu revenue Alexandrine ? Tu n’aimes ni ton fils ni ton mari.

Et là, à cet instant précis, j’ai compris. J’ai tout compris ! Elle est amoureuse de mon mari, quoiqu’elle en dise, quoiqu’elle voudrait me faire croire, et c’est elle qui m’a donné à penser, que je n’aimais pas Joss, c’est encore elle qui m’a donné à penser que de toute façon mon enfant ne sera pas mon enfant mais celui de Jocelyn !

Je la regarde bien en face, je la sonde, je la toise, et avec un calme que je n’ai pas, d’une voix, que je maitrise, un léger sourire aux lèvres je lui balance en pleine tronche.
..... Marie, je croyais réellement, au fond de moi que tu étais une amie, une vraie, comme une sœur. .........

Je prends une bouffée d’air ........ Mais tu as perdu, je ne te laisserais pas ma place. Effectivement tu as raison, nous nous sommes tout dit, je n’ai rien à rajouter !

Je ramasse mon paquet de cigarettes, mon briquet et les range dans mon sac, je décroche mon téléphone en la foudroyant du regard, pour bien lui faire comprendre que nous n’avons plus rien à nous dire. Je la regarde se lever, et avant qu’elle franchisse le seuil de son bureau, je lui lance froidement

...... Ferme la porte !

Je viens enfin d’avoir la confirmation que tout ce que je lui confiais, était retransmis à mon mari en rapport détaillé et souvent déformé. Et c’est pour ça, que le soir souvent il était ombrageux et refusais une discussion. Trop de choses me remontent en mémoire.

J’appelle mon directeur.

...... Oui Alexandrine.

..... Je peux vous parler monsieur avant que vous alliez déjeuner ?

.... Descendez, je vous attends.

En allant voir mon directeur, je suis déterminée.  

Après lui avoir serrer la main, je m’assois et le regarde droit dans les yeux

.... Monsieur Brandon je voudrais vous expliquer ma situation.

.... Allons déjeuner mon petit.

Nous n’allons pas au restaurant réservé aux cadres. Il m’emmène à ce restaurant en bas du boulevard.

Tout en mangeant je me confie.

...... Monsieur Brandon si j’ai quitté mon mari, c’est parce que les disputes étaient incessantes. Les Dabarino sont très proches de mon mari. Je me confiais souvent à Marie, et je me suis rendu compte que Jocelyn était au courant de tout .........
Et je déballe pratiquement toute notre conversation de ce matin, sans oublier qu’elle m’a avoué être jalouse de moi. Que c’est elle qui m’a fait penser que mon mari n’était pas pour moi, elle qui m’a poussé à le quitter. Je finis par lui avouer que Marie, ma meilleure amie me tire dans les pattes parce qu’elle est amoureuse de mon mari

Monsieur Brandon ne m’interrompt pas, il me laisse vider mon sac, mon cœur, Je lui parle de cette photo que j’ai reçue, sachant qu’à part monsieur Dabarino, dans l’entreprise de mon mari, personne ne sait où je travaille.  

Monsieur Brandon sourit ........ Qui ne le serait pas ? Alexandrine !

....... Monsieur Brandon, elle est mariée, son mari est charmant, de plus il est le bras droit de mon mari.

..... Oui mais que le bras droit ! Tout comme elle n’est que votre secrétaire, donc à chaque fois, en dessous de vous !

..... Qu’est-ce que j’y peux ? Elle n’a jamais voulu de responsabilités, elle n’a rien fait pour monter en grade

Il sourit en me regardant. Un sourire bienveillant, comme un père. ...... Que comptez-vous faire ?

Le cœur battant, je sais que je mets délibérément sa carrière en l’air, mais je ne pourrais pas la supporter davantage, je vais finir par la haïr.

...... Monsieur Brandon, vous devez comprendre qu’il n’est pas possible qu’elle reste ma secrétaire, mais comment faire ? 

Il me regarde fixement, détaille mon visage, remonte à mes yeux et plonge dedans. Je me sens rougir.

...... Alexandrine, tout est possible, elle n’a pas le titre de secrétaire. J’attendais de voir ! C’est étrange, comme je pressentais qu’elle était responsable de votre état.

Je le regarde étonnée ...... Ah bon, comment ça ?

Il sourit .......... Lorsque vous étiez en stage à Lille, elle est venue me voir tous les jours, et tous les jours je lui répondais que vous étiez absente, sans lui donner de raison. Un matin je l’ai retenue et nous avons discuté. Je lui ai demandé d’où lui venait cette inquiétude, sa réponse m’a bluffé !

Mon pouls s’accélère ........ Comment ça ?

......... Disons que son point de vue sur la question, m’a laissé dubitatif.

..... Dites-moi monsieur Brandon, je dois savoir, je dois pouvoir parer.

Je suis presque suppliante, il pose sa fourchette, repousse son assiette

Il sourit .......... A ses dires, j’ai compris, qu’il y avait anguille sous roche. Elle m’a dit textuellement. Vous savez monsieur le directeur, vous connaissez Alexandrine au travers de son travail, mais dans la vie, elle est tout autre. Elle a un homme adorable, et admirable. Il fait tout pour elle, j’en suis témoin. Elle a tout pour être heureuse, vous avez vu la propriété qu’il lui a acheté ? Il l’a décoré selon les désirs, les goûts, les envies de madame. Il a mis une fortune dans cette maison. Il lui a fait construire une piscine royale, rien que pour elle, pour son petit plaisir. Elle n’est même pas reconnaissante. Son mari la sort lui offre des tenues, des bijoux, cède à tous ses caprices. Mon mari serait et ferait le quart du sien, j’aurais une bien autre attitude, je lui prouverais mon amour tous les jours. Ce n’est qu’une égoïste, une ingrate insensible. Elle s’en moque de lui.

Je sais que je suis livide d’une voix blanche je demande ce qu’il a répondu.

………. Alexandrine je vous connais depuis disons votre enfance ! Je connais vos souffrances comme vos joies. J’ai simplement répondu. Ce que fait Alexandrine en dehors du travail ne nous concerne pas, ni vous ni moi. J’ai mis fin à la conversation. Je me devais de vous en parler, mais j’attendais le bon moment !

Je ne sais même pas quoi répondre. Je suis complètement vidée, brisée.

…… Pendant votre longue maladie, elle venait me donner des nouvelles. D’après ses dires, vous alliez très bien. Elle n’avait de cesse de me faire comprendre que vous n’étiez qu’une malade imaginaire. Elle pensait me manipuler et prendre votre place. J’ai eu quelques fois votre mari au téléphone, qui me donnait aussi des nouvelles qui démentaient celles de madame Dabarino.

Il me regarde longuement, une envie de pleurer me prend. J’essaie d’enrayer

..... Alexandrine, patientez, laissez faire les choses. La roue tourne pour tout le monde. Je vais profiter de la restructuration et vous l’enlever.

De la tête je fais oui, complètement abattue de comprendre que je me suis entièrement fourvoyée sur cette amitié que je croyais indestructible, de cette confiance que je mettais en elle, alors que jour après jour, elle me dégringolait.

Nous rentrons sans prononcés un mot. Je remonte dans mon bureau, les idées pas très claires, je n’arrive pas à ranger les choses dans leurs cases. J’essaie de me plonger dans mon travail, sans vraiment être à ce que je fais.

Je me prépare un café, allume une cigarette et les yeux dans le vague, j’essaie de faire les questions et les réponses. Est-ce que Joss m’aime vraiment ? Est-ce qu’il a une aventure avec Marie ? Qui m’a envoyé ce courrier ?

Un petit déclic attire mon attention. Je décroche mon téléphone et enfonce la touche du bureau de Marie. Sur mon écran, s’affiche le numéro de l’appartement. Je retiens mon souffle.

Sans lâcher le combiné, je sors mon portable de mon tiroir et appuie sur enregistrement. Je veux avoir des preuves qu’ils ont une liaison. Je pose les deux téléphones tout en essayant d’écouter dans le combiné en me penchant légèrement sur ma table de travail.

…… Bonjour Joss, je te dérange ?

La voix de Jocelyn arrive à mon oreille ……... Bonjour ma grande, pas plus que ça, pourquoi ?

..... J’ai eu une conversation avec elle ce matin, elle se pose des questions 

...... Quelles questions ?

..... Pourquoi nous avons mis notre maison en vente.

.... Et qu’as-tu répondu ?

..... Bah rien, tu voulais que je lui dise quoi ?

.... Sauter sur l’occasion et lui dire la vérité !

Mon cœur s’emballe si fort que je l’entends cogner dans ma poitrine. Je manque d’air, et m’accroche au bord du bureau de toutes mes forces, tout en continuant d’écouter

..... Tu sais que ça ne se fera pas, inutile de dire des choses qui ne sont pas vérifiables !

…. Et pourquoi ça ne se ferait pas ? Veux-tu que je voie avec Phil ? C’est votre idée.

….. Non Joss, laisse tomber, ce n’était pas une bonne idée, je te l’ai dit.

…. Hum ! Oui et ensuite ?

.... Là, ça serait trop long à t’expliquer, nous avons parlé pratiquement toute la matinée.

….. Donne-moi les gros traits !

….. Bah elle me reproche plein de trucs, vos engueulades sont de ma faute, ça vient de moi, de nous.

….. De nous ?

….. De Phil et moi. Tu lui répétais ce que je te disais ?

….. Ne prend pas Alex pour une idiote. Je ne pouvais faire, l’étonné quand elle me parlait d’une chose dont j’étais au courant dans la journée.

…. Elle m’a demandé pour l’échographie, tu lui as dit quoi ?

….. Rien, ma grande !

J’ai le cœur qui bat si fort, que j’en ai mal dans la poitrine. J’entends Marie pousser un grand soupir, avant de reprendre

…… Elle me reproche de ne pas m’occuper de Jonathan, je t’ai téléphoné tous les jours. Au baptême elle faisait la gueule, qu’est-ce que je pouvais faire ?

….. Que veux-tu que je te réponde ? Le jour du baptême tu n’as pas été très représentative. Ma sœur est venue me chicaner en me demandant où j’avais dégotté la marraine. Le samedi des achats, paraitrait-il que tu n’aies pas décroché un mot !

….. Elle était collée à Marie Astrid, le samedi des achats, elles riaient toutes les deux, j’étais invisible, je devais faire quoi ?

Je retiens ma respiration. Comment j’ai envie d’aller lui baffer sa gueule, la garce. J’essaie de garder mon calme, et de ne pas faire de bruit.

…… Marie, je pensais qu’au baptême vous vous étiez réconciliées, Alex, était plaisante avec tout le monde, je ne comprends pas !

…… Elle donnait le change, c’est une hypocrite, depuis le temps tu n’as pas vu son jeu ? Et pourquoi inviter ta sœur ? Alors que nous devions être que toutes les deux ?

….. Hum ! Je ne connais pas Alex avec un double visage ma grande. Quant à ma sœur, il semblait normal qu’elle participe non ? Je ne vois pas mon beau-frère s’occuper des achats.

….. Oui, encore une excuse qui tombe bien à propos, alors qu’au téléphone je t’avais dit que je voulais que tu nous accompagne, tu aurais vu par toi-même son faux sourire, sa fausse amitié.

J’ai envie de sourire, d’ailleurs je souris. Donc mon stratagème a fonctionné, et c’était sans compter Marie Astrid qui prendrait ma défense.

…… Marie, Alex t’apprécie autant que j’apprécie Phil, vous êtes amies depuis tant de temps !

….. Elle se sert des gens, Joss. Mais t’inquiète, je vais reprendre ma place de marraine, je te promets, je vais m’occuper de Jonathan, je vais l’aimer à sa place. Vraiment elle ne vous mérite pas, le petit et toi !

…… Tu ne peux pas dire ça Marie, je ne te le permets pas !

….. Joss tu es aveugle ou quoi ? Elle n’a que Choupette à la bouche, sa dévergondée de fille, alors que son bébé elle ne s’en occupe même pas. Elle n’en voulait pas et maintenant elle le rejette.

….. Elle travaille je te rappelle !

…. Ah oui c’est vrai, au lieu d’élever son enfant et tu peux faire une croix sur un 4/5 et un deuxième enfant, je te le certifie, elle ne sacrifiera pas sa carrière pour toi. D’ailleurs avec les collègues on a du mal à comprendre que la place de cheffe de service lui soit revenue, elle a manqué au moins six mois, avec sa pseudo dépression. C’est étrange non ?

Et là je suis surprise du ton qu’emploie mon mari. Ce ton sec et froid ………. Dis-moi Marie, as-tu arrêté ton travail pour élever ta fille ? A dix ans elle était en internat. Sais-tu ce qu’est un internat ? Pas d’amour pas de chaleur ! Alors n’accuse pas Alexandrine de tous les maux !

…… Mais j’étais bien obligée de travailler, nous avions des crédits, et ma fille je l’ai élevé, elle n’était qu’en nourrice j’allais la chercher, m’en occupais. Je ne suis pas mariée à un millionnaire. 

….. Toutes les mères qui travaillent, ne mettent pas leur enfant en internat. Ceci dit, Marie, non que je m’ennuie mais je vais être obligé de te laisser. Arrête de geindre, tu as un bon mari, tu fais partie des privilégiées, Phil a une bonne situation !

……… Elle est bien plus privilégiée que moi. Tu la sors, tu l’emmènes au théâtre au resto au ciné, tu ne la prive de rien, pour les remerciements que tu en as. Tout est normal pour elle. Nous on l’a sortie de sa merde et tu vois aujourd’hui comment elle nous gratifie ? En nous tournant le dos.

…… Il est une chose que je ne comprends pas Marie

….. Oui dis-moi Joss 

….. Pourquoi nous avoir réconciliés si vous saviez, ou pensiez savoir qu’Alexandrine ne m’aimait pas ?

….. Ce n’est pas mon idée, tu le sais. C’est Philippe qui a insisté, quand il t’a vu dans cet état de détresse.

….. Et pourquoi ne m’as-tu jamais dit l’état de ton amie, qui dépérissait de jour en jour, quand je te demandais ?

…… Bah non ça pouvait aller, elle se relevait, elle aurait fini par passer à autre chose !

….. Marie soit gentille, arrête de me prouver qu’elle ne m’aime pas, je pense que beaucoup de choses ne seraient pas arrivées si tu n’avais pas mis autant ton nez dans notre couple !

….. Je le faisais pour toi Joss. J’étais malheureuse pour toi. Phil me disait le soir que tu n’allais pas bien.

….. Alex qui est ton amie, allait mal aussi. Tu as fait quoi ?

….. Elle faisait celle qui allait mal, pour attirer la sympathie des autres, tu sais bien comment elle est.

……. Marie, cesse tout de suite. Tu l’as vu mourir à petits feux, tu n’as pas levé le petit doigt, alors que tu étais tous les jours à me réconforter. Je ne saisis pas où tu veux en venir ! Je ne sais pas quel jeu tu joues !

…… Jocelyn, tu ne peux pas, ne pas comprendre. J’ai des sentiments pour toi, j’ai ….

Il lui coupe la parole ……. Marie, arrête tout de suite, tu es mariée à mon meilleur ami. Je t’aime bien, je t’apprécie au plus haut point, mais je ne t’aime pas, j’aime ma femme et j’aurais le restant de mes jours des regrets et remords de lui avoir donné tant de tourment. Retourne à ton couple secoue ton mari, et vis pleinement. Ne gâche pas tout Marie, en m’avouant des sentiments que tu n’as pas. Tu aimes la vie d’Alexandrine, tu ne m’aimes pas !

Pleurnichant elle continue ………. Si Joss je t’aime, et je saurais te rendre heureux, je serais une maman pour Jonathan

Un grand éclat de rire arrive dans le téléphone qui se répercute dans mon portable. ‘’Oh merde, ne va-t-elle pas entendre l’écho ?

….. Marie, tes attitudes peu conventionnelles doivent cesser. Il est vrai qu’Alex est d’un tempérament fort, et il est vrai que j’ai souvent perdu patience, et tu sais pourquoi ?

…. Non !

 ……. J’avais en tête tes confidences, j’avais en tête, qu’elle se moquait de moi, qu’elle n’était pas amoureuse mais attirée par notre train de vie. J’avais en tête ce qu’elle te racontait et que tu me rapportais. Je me suis rendu compte qu’elle m’aime vraiment.

….. On va dire ça comme ça. Tu sais elle devrait faire du théâtre, elle joue bien !

………. Ne m’oblige pas à couper les ponts et à en donner la raison à ton mari !

Elle pleure carrément ………. Jocelyn écoute-moi, je t’en supplie, nous serions heureux tous les deux !

….. Allez Marie, je t’embrasse, à bientôt !

Suppliante elle s’accroche …… Qu’allons-nous devenir Joss ?

….. Rien Marie !

….. Elle ne te rend pas heureux, comment peux-tu ne pas t’en rendre compte ?

Avant qu’elle rajoute quelque chose, il a raccroché. Je suis sidérée par cette conversation. La garce ! Pire, une véritable salope. J’attends qu’elle raccroche pour à mon tour reposer le combiné sur son socle. J’arrête l’enregistrement de mon portable et écoute savoir si la conversation est claire.

J’appelle monsieur Brandon.

….. Oui Alexandrine.

….. Je peux descendre vous voir ?

….. Oui bien sûr !

Dans l’armoire à dossiers, je prends la grande enveloppe, que je range dans une chemise en carton. Je referme la porte à clé, enfile mon manteau, ferme mon bureau à clé, et glisse mon portable dans ma poche

Je m’affale sur le siège, monsieur Brandon m’observe ……… Qu’est-ce qui vous arrive mon petit ?

…… Monsieur Brandon, retirez dès demain Dabarino de son poste, ou alors je vais me faire virer pour agression, je vais lui péter sa tronche

Le directeur éclate de rire ……. Que se passe-t-il ?

Je sors mon portable, mets en route l’enregistrement et pose le téléphone sur son bureau. Il ne parle pas, son visage se décompose au fur et à mesure.

Il me regarde longuement ………… Pouvons-nous attendre la réunion ?

…….. C’est quand ?

Il regarde son semainier …… Jeudi prochain. Pouvez-vous patienter ? 

….. J’ai bouclé mon dossier, pouvez-vous me donner des jours ? Demain on voit pour clôturer la réunion

….. Oui bien sûr !

…… Alors je prends mon lundi et mardi, demain de voir sa gueule sera déjà de trop. 

Monsieur Brandon sourit, il sort une feuille de congé et me la fait signer.

….. Demain dès votre arrivée, venez me voir, nous mettrons nos idées en commun. Essayez de me faire des unités qui tiennent la route pour la direction. Pensez à votre future secrétaire.

….. C’est fait monsieur.

Tout en lui répondant, je sors la photo de l’enveloppe et lui tends

…… C’est un vulgaire montage mon petit.

….. Oui bien sûr, maintenant je m’en rends compte mais sur le coup, je n’ai vu que la photo.

Il tend la main, je lui donne l’enveloppe qu’il examine. Comme moi il remarque que l’écriture est enfantine, comme imitée ou truquée.

….. Dites-moi Alexandrine, votre mari à sa société dans les Yvelines, me semble-t-il

….. Oui à Plaisir.

…. N’avez-vous pas vu que cette enveloppe était postée de Paris ?

….. Heu non, pourquoi ?

……. Renseignez-vous auprès de votre mari qui habite Paris dans son personnel. Ils ne doivent pas être nombreux.

Je suis abasourdie, c’est certain qu’en travaillant à Plaisir, automatiquement on habite dans les environs. Je hoche la tête

…… Allez mon petit, faites route vers votre mari, vous avez la preuve qu’il vous aime, ne mettez pas le loup dans la bergerie

Une envie de pleurer me serre la gorge. D’une voix enrouée je demande si Marie peut aussi écouter mes conversations, puisque je peux écouter les siennes.

Monsieur Brandon me rassure ……. Non Alexandrine, soyez rassurée, c’est à sens unique, vous pouvez si vous le souhaiter balancer tous les appels sur votre poste. Tout comme ma secrétaire ne peut écouter mes conversations, alors que je peux écouter les siennes !

Il me sourit, je le remercie, reprends la photo que je remets dans l’enveloppe et celle-ci dans la chemise, je ramasse mon téléphone, lui sers la main, il m’attire et m’embrasse très paternellement.  

Je range l’enveloppe dans mon sac. Je suis vidée, complètement écœurée. Je me fais un café, allume une clope. Je reste dans le vague. Une heure plus tard, je vérifie que tout soit fermé, et pars.

Je traine au forum, le temps de m’apaiser avant de rentrer. Je préfère ne pas être au bureau, au risque que j’aille voir cette pute et la gifle à la volée. Elle porterait plainte, et ça se retournerait contre moi.

Je vais directement voir mon fils. Je le prends dans mes bras, et vais frapper à la porte du bureau de mon mari, tout en entrant.

Je l’embrasse et m’assois en face de lui ……… Tu as l’air fatigué mon amour.

….. Oui ma douce !   

…… Joss, tu m’as dit avoir le listing de tes employés avec toutes leurs coordonnées.

…… Effectivement.

….. Tu l’as ici ?

…… Oui bien sûr pourquoi cette question ?

Le petit sur mes genoux commence à s’agiter, on ne s’occupe pas de lui. Je me penche et lui fais un bisou. Je propose à mon mari de venir au salon se relaxer et prendre un verre avec moi.

Il se lève, prend l’enfant et entoure mes épaules. Nous allons nous installer au salon. Je demande à Danielle de nous amener un rafraichissement avant d’aller au salon.

Je m’assois en biais, pour voir Jocelyn. Je voudrais enlever cette ride au milieu de son front. J’effleure ses lèvres.

….. As-tu des employés qui habitent Paris même, ou tout proche ?

Il semble réfléchir ……. Non pas que je sache. Philippe c’est certain, pourquoi ?

….. Et si ce n’était pas quelqu’un de Gaussien qui aurait envoyé cette lettre ?

…… Qui de l’extérieur ?

Je me lève, prend le petit qui s’agite, vais le porter à sa nurse et attrape mon sac.

…… Mon amour, j’ai la lettre avec moi !

Je sors la grande enveloppe de mon sac, et mets un doigt sur le timbre. ….. Cette lettre a été postée la veille de Paris, regarde l’heure. Quatorze heures quarante-cinq. Comment un de tes employés peut être sur Paris à cette heure-là ?

 ….. Un en vacances, c’est vérifiable.

Je souris. …….. Ne perds pas ton temps. A quatorze heures quarante-cinq, c’est l’heure du courrier chez nous, et le service oblitère les courriers par une machine !

…… Que cherche-tu à me dire ? Une collègue à toi ? Impossible ma douce, comment aurait-elle eu la cour de chez Gaussien ?

….. La cour de chez Gaussien, est sur toutes les revues viticoles œnologiques. Attends !

Je traverse le couloir presqu’en courant, dans son bureau je prends le premier magasine qui me tombe sous la main, le feuillète et reviens au pas de course.

Je tends le bouquin à Joss ………. Regarde !

….. Je ne vois pas tes collègues acheter ou s’abonner à une telle revue.

…… Joss, j’ai eu une conversation avec Marie ce matin, et elle m’a avoué être amoureuse de toi, m’a reproché d’être revenue avec toi, que je n’avais rien à faire dans ta vie. C’est Marie elle-même qui m’a envoyé ce courrier !

Joss est blanc, cadavérique, même ses lèvres sont exsangues.  …….. Ce n’est pas possible !

…….. Ce n’est pas Phil ! Il ne nous atteindrait pas par un coup aussi tordu. Il a tout fait pour qu’on se retrouve, il a tout fait pour t’aider, il t’a envoyé vers un psy, il t’a parlé, il nous a rapapilloté, pourquoi voudrais-tu qu’il nous détruise après tout ça. J’ai eu du mal à rassembler les pièces du puzzle. Ce n’est pas Phil comme je l’ai cru, c’est cette pute.

Un léger sourire se dessine sur son visage fatigué. Il ne relève pas ma grossièreté. ……. Comment la contraindre à parler ?

……. Mon amour, tu comprends bien, que je ne peux pas la garder à mes côtés. J’en ai parlé à monsieur Brandon, qui m’a raconté l’amitié de Marie envers moi

En quelques mots je lui rapporte ce que monsieur Brandon m’a révélé

….. Et tu peux lui téléphoner demain, il confirmera. Je ne mens pas.

Il enlace mes épaules et m’attire à lui. ……. Je te crois ma douce.

….. La semaine prochaine, nous avons une réunion avec la grande direction. Lundi et mardi je ne travaille pas, je reste avec toi. Je t’aiderai si tu as besoin. Appelle-là dis- lui heu.  ……..

Je réfléchis quelques secondes, je ne peux pas parler de l’appel téléphonique que j’ai entendu.
….. Heu dis-lui, je ne sais pas. Que je recommence à faire chier, que tu en as marre, que tu ne sais pas quoi faire. Elle va s’épancher. Tu sais faire parler les gens, tu y arriveras mon amour. Fais-la avouer

……. Mon ange, elle m’a téléphoné cet après-midi. Je comprends pourquoi maintenant.

….. Elle t’a dit quoi ?

…. Des niaiseries d’adolescente. Comme quoi tu n’étais pas faite pour moi, qu’elle saurait me rendre heureux, qu’elle aimerait Jonathan comme son fils. J’ai coupé court et raccroché.

….. Bah voilà, tu as le prétexte et le sujet tout trouvé.

….. Nous l’appellerons lundi ma douce. Veux-tu sortir ?

……. Si ça te fait du bien, oui.

….. Oui j’ai besoin de me changer les idées. Je suis tellement ……

Il sourit. …… Comme dirait mon amour de petite femme. Sur le cul !

J’éclate de rire, et l’embrasse à pleine bouche.

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