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Alexandrine, cette étrange rencontre
5 juin 2001

La Bretagne

J’attends mon frère, je bois un café, la télé allumée sur des clips de chansons. Mon portable sonne. Je décroche machinalement pensant que c'est ma fille.

C'est lui, mon sang se glace. Je suis obligée de m'asseoir. Mon cœur bat à tout rompre 

..... Bonjour ma douce as-tu dormi un peu ? 

J’essaie de me ressaisir, de calmer ce cœur qui s’emballe.

........ Ecoute ma douce, je prends quelques jours et t’emmène en Bretagne pour te reposer

...... Non ! 

J’ai presque crié. Il continue ....... Rappelle-toi, notre séjour t'avait enchanté. Tu m'as dit que tu aimerais y retourner 

....... Oui, heu, .... Non ! 

..... Sais-tu ce que nous allons faire ? Je viens te chercher à 10 heures et nous prenons la route pour la semaine.

..... Heu  

..... Ça te va ma douce ? 

Mon cœur cogne dans ma poitrine à m’en faire mal, j’ai le souffle coupé, je ne réponds pas.   

..... Je t'embrasse à demain ma toute belle

Je raccroche, je ne comprends pas comment il a pu me téléphoner. J'avais bloqué son numéro. Je regarde sur mon portable. C'est un numéro que je ne connais pas ! Je le bloque instantanément

La Bretagne, qu'est-ce qu'il veut que j'aille faire là-bas. Je veux allez chez mes parents. Je veux me faire dorloter. Me retrouver petite fille insouciante entre un papa d'amour et une maman qui lève les bras au ciel en disant ‘’ Oh cette enfant.’’

Et moi rire à gorge déployée en prenant ma mère dans mes bras et en dansant avec elle au son d'une musique qu’il n'y a pas. Je veux que mes frères me prennent sur leurs genoux et me raconte le petit chaperon rouge, Sébastien faisant le gros méchant loup, Stéphane le petit chaperon rouge. Et moi rire aux larmes. 

Je ne veux pas aller en Bretagne, il n'y a pas mon papa, pas ma maman, pas mes frères

J'éclate en sanglots. 

Je me lève épuisée, je vais m’habiller, les gestes me coutent, chaque mouvement est une corvée. Je me sers un nouveau bol de café au lait, et mon cendrier vidé, je m'installe en boule sur le canapé pour attendre Sébastien  

Je suis prostrée dans mon canapé, quand la sonnette retentit, j'ouvre la porte ! Je me sens défaillir. De pâle, je deviens exsangue

Il entre beau comme un Dieu. Un jeans moule ses cuisses musclées. Il a mis ses lunettes de soleil sur le haut de sa tête. 

Il m'embrasse et me demande si je suis prête. Je me paralyse sur place

.... Où est ton sac ma douce ?

‘’Quel sac ? je n'ai pas de sac. Pourquoi faire un sac, je vais chez mes parents. C'est mon frère que j'attends. Qui devait venir me chercher. Pourquoi c'est lui qui est là ?’’

Il me regarde je suis incapable de répondre. Il se dirige vers ma chambre. Je le suis des yeux sans bouger, je me suis remise en boule sur mon canapé. Je suis contrariée, une envie de pleurer me prend.

Il ressort mon sac de voyage à la main, le pose dans l'entrée et vient me chercher. Comme un spectre, je me lève avec difficulté. Il essuie mon visage dégoulinant et m'entraine. Il prend le sac au passage, ferme ma porte, et m'installe dans la voiture. 

Il démarre, Je m'endors. Aux alentours de 13 heures, il me réveille. Nous sommes sur un parking de restaurant. Il ouvre ma portière, me laisse descendre. Nous nous dirigeons vers l'entrée du restaurant. Il ne dit pas un mot, ça m'arrange. Je n'ai pas envie de parler. Je n'ai surtout pas envie de lui parler. 

Il commande, je mange, non je picore, je n'ai pas faim. Je roule une mie de pain entre mes doigts depuis un bon moment

Il prend ma main, me regarde, je le fixe sans même le voir. Il ne lira rien, mes yeux c'est le néant ! Je me dégage.  

Nous reprenons la route, vers quinze heures nous arrivons dans un bel établissement hôtelier, en bordure de mer. Notre chambre a une grande baie vitrée qui ouvre sur une terrasse, juste en face de la mer, on peut sentir les embruns. 

Je m'appuie sur la rambarde du balcon et reste là de longues minutes, à regarder le mouvement des vagues. 

Il vient derrière moi, m'enlace la taille et reste sans parler ! Je ne bouge pas.  

M’arrive en tête, la chanson d'Alain Barrière  

- Et je reste des heures à regarder la mer  

- Le cœur abasourdi, le regard de travers  

- Et je ne comprends rien à ce triste univers  

- Tout est couleur de pluie tout est couleur d'hiver................  

La voix de Jocelyn me sort de ma torpeur  

........ Veux-tu te promener sur la plage ma douce ?  

Je hausse les épaules. Doucement, il m'enlace, nous descendons le grand escalier recouvert de tapis rouge, nous marchons au même pas, il a réglé le sien au mien. Je me dégage de son bras. Mets mes mains dans mes poches. 

Mon cerveau se met en route ‘’Ne me touche pas ! Ne me touche plus ! Va te faire foutre ! Va chercher une autre conne. Moi j'ai donné ma démission. C'est fini ! Tu comprends ? Fini !’’

Nous nous promenons en silence, pendant une bonne heure. Il me fait asseoir dans le sable s'assoit à côté de moi.

Je l'entends pousser un soupir. On reste là, je plonge mes yeux dans cet océan. Je ne sais même pas où nous sommes. 

Il se lève, me tend la main pour m'aider à me lever, nous rentrons à l'hôtel, main dans la main. Il va faire couler un bain, me prend dans ses bras, m'attire sur le lit, me berce comme un enfant.

Je fonds en larmes. Il m'emmène dans la salle de bains.  

......... Détends-toi. Nous irons souper après !  

Doucement il ferme la porte, je reste planté devant la grande baignoire. La vapeur et la chaleur m'entourent d'une torpeur, je ne bouge pas. Combien de temps je reste comme ça à me regarder sans me voir dans cette grande glace ?  

Je vois la mousse dans le bain, ça me fait envie, je me déshabille en faisant tomber mes vêtements un à un par terre, et me glisse dans l'eau. Je suis bien, je m'apaise, je reste jusqu'à ce que j'aie froid, je suis toute molle, j'ai les bouts de doigts tout ratatinés.

Choupette petite, disait oh maman regarde j'ai les doigts de mémé (ma grand-mère décédée depuis) 

Je me réveille de ma prostration. Je me frictionne dans la grande serviette, j'ai froid. 

Je m'aperçois qu'il y a longtemps bien longtemps que je n'ai pas ressenti le chaud ou le froid sur mon corps.  

Mon sac de voyage est posé sur un petit meuble. Je regarde ce qu'il y a dedans, prend mon pantalon noir, je l'enfile, il tombe sur mes hanches. Il est trop long, je fais deux tours à la ceinture pour le remonter un peu

Je me coiffe, fouille dans mon sac, mon eau de toilette est là ma trousse de maquillage aussi. Je la regarde sans réagir, je prends mon gilet, et le passe, j’ai froid

Joss est sur la terrasse avec un magazine dans les mains, ses longues jambes étalées. Il les ramène vers lui et me tends la main. Je l'ignore.

.....  Es-tu prêtes ma douce ?  

...... Oui  

... On y va ma belle il est vingt heures vingt

Je réfléchis "Mais combien de temps je suis restée dans le bain au moins deux heures ?"  

..... On descend dîner ma douce ?  

..... Non !

...... Ne veux-tu aller dîner ? 

.... Je n'ai pas faim 

Il prend doucement ma main, et m'entraîne. Je me laisse faire. Nous nous dirigeons vers une grande salle à manger. Un type nous emmène à une petite table en retrait, devant la baie vitrée nous avons vue sur la mer.

Joss commande un martini et un whisky. Je fige mon regard au travers de la grande baie vitrée. Nos boissons arrivent. Joss ne me quitte pas du regard.

Je ne touche pas à mon verre. Je ne toucherai pas au repas. Je boirai de grands verres d'eau fraîche

Joss essaie plusieurs sujets de conversation.  Je ne réponds que par Oui ! Non ! heu ! Ché pas !

Je m'évade dans le spectacle que les vagues font, les yeux fixent. 

Nous remontons dans la chambre. J'enfile un pyjama et vais sur la terrasse fumer, pendant que Joss est à la salle de bains. Il ressort en pyjama et me rejoint.

..... Veux-tu te coucher ma douce ? 

.... Non !

Il rentre dans la chambre. Je passerai un bon moment sur la terrasse à fumer.  Il fait nuit-noire quand enfin je me décide à aller me coucher. Jocelyn ne dort pas, il bouquine. Je me couche au bord du lit. Je ne veux pas qu'il s'approche !

Je n'ai plus aucune force. Moi la combattante, je suis anéantie de toute part. Je finirai par m'endormir. En laissant de la place entre lui et moi. 

Je me réveille doucement. Jocelyn est sur la terrasse. Une table ronde garnie d'un petit déjeuner royal. Je me sers un café et allume ma cigarette. Je ne lui parle pas.

.... Bonjour ma douce, as-tu dormi un peu ? 

Je le regarde et hausse les épaules. Je vais m'habiller. Je regarde l'heure sur mon portable il est 10 heures quarante. 

Joss me propose une balade avant le repas. Je le suis sans un mot, sans un geste. Je plonge mes mains dans mon jeans, pour éviter qu'il me les touche. Il mettra son bras autour de mes épaules. Je laisse faire. 

Comme hier, nous marchons sans un mot, sans but réel. Il me conduit à la salle à manger de l'hôtel.  

Je m'aperçois que j'ai un peu faim.

Il commande un martini et un whisky.  Le serveur amène nos verres avec une petite soucoupe pleine de bretzel. 

Je trempe mes lèvres dans mon verre.

.......Qu'est ce qui te fais sourire ma douce ?  

Je le regarde sans comprendre, j'ai souris moi ? Je ne m'en suis même pas rendu compte. Je cherche mon verre que j'ai toujours à la main.  Je retrempe mes lèvres et là je sais 

........C'est le martini il n’est pas aussi bon que celui de Marie.

Il sourit aussi et de sa voix chaude, doucement comme s’il parlait à une enfant qui relève de longue maladie

.... Celui de Philippe comme le mien, vient directement d'Italie  

...... Ah !  

La conversation s'arrête là. Je croise son regard, il sourit, mais reste songeur.  

On nous amène un plat de grosses crevettes roses. Elles sont toutes épluchées, il ne reste qu'un petit morceau de queue, du pain et un pot de beurre salé. 

J'en mange deux, je me régale, elles sont charnues, ça excite mes papilles gustatives. Joss me fait une tartine de pain beurré. Je ne la mange pas. 

On nous amène une sole, dans une énorme assiette ovale avec quelques pommes de terre parsemées de persil.
je regarde l'assiette d'un air de débile profonde.

Pensée ....... " Oh non ! Je ne pourrais pas tout manger."

Mon sang se vide, je deviens livide.     

..... Que se passe-t-il, tu n'aimes pas la sole. Veux-tu que je demande un autre plat ?  

Je sens mes larmes arriver. Je ne réponds pas.  

...... Ma douce, relax ! Mange ce que tu peux.  

J'attrape mon couteau à poisson commence à piocher. J'en mange deux petites bouchées.  

Une coupe glacée avec plein de chantilly est servie au dessert

En moi-même, je souris alors là faim ou pas faim, je suis trop gourmande c'est mon péché mignon. 
Je mange deux cuillères, je ne peux pas plus. Je suis prise de nausées.

Jocelyn m'observe en silence, il est soucieux et je m’en tape

Après manger on va marcher un peu sur la plage. J'ai envie d'une cigarette, je réalise que je ne les ai pas. Que je n'ai pas fumé depuis le retour qu'on est allé sur la plage dans la matinée.
Nous remontons dans la chambre. Je file sur la terrasse. Je m'accoude à la balustrade et fume deux cigarettes, l'une derrière l'autre.

 ..... Dis ma belle, veux-tu aller faire un tour en ville ?

Je le regarde hausse les épaules. Je m’en tape, " Là ou ailleurs, qu'est-ce que ça change ? "

Nous partons tranquillement à pied jusqu'au centre-ville. Il m'entraine vers les rues piétonnes. Des magasins tout le long. Tous accolés les uns aux autres. Il me dirige vers une grande enseigne. 

Il demande à la vendeuse qui nous reçoit avec un large sourire.

......... Montrez-nous ce que vous avez en jeans pour Mademoiselle.

La vendeuse demande ma taille

 ....  Heu ... 38

Elle a un regard dubitatif et m'apporte du 36. Je l'essai. On dirait que j'ai un sac sur le cul. La vendeuse prévoyante me tend un 34.

La vendeuse se rend compte que Jocelyn ne regarde pas à la dépense. Elle lui montre d'autres formes de jeans, des dos nus, des tee-shirts des liquettes. 
Il prend deux jeans de modèles différents. Plusieurs dos nus, et tee-shirt. Deux liquettes. Un pull léger deux robes légères. Des chaussures en toile.  Le tout de grande marque. Tantôt avec une virgule, Tantôt avec un crocodile. Tantôt avec ce félin brodé en noir. 

 ..... Est-il possible d'être livré à l'hôtel ?

 ..... Je vais me renseigner Monsieur. 

Elle se dirige vers un type à la caisse, qui doit être le patron. Nous la suivons. Jocelyn sort une de ces cartes gold. 

Le type avec un grand sourire, nous dit qu'il n'y a pas de problème que nos paquets seront remis à la réception de notre hôtel.  

J'ai gardé un jeans neuf, les chaussures de toile et un tee-shirt avec une liquette. En sortant, je dis juste, merci

Il ne dit rien.  Ne cherche pas ma main. Ne me prend pas par les épaules ni par la taille. Nous marchons au même pas, il a réglé le sien au mien. 

.... Veux-tu aller prendre un verre ma douce ? 

Je hausse les épaules en signe de réponse. Je m’en tape.

Nous nous asseyons sur une terrasse au soleil, face à la mer.  Nous ne parlons pas. Je sirote mon verre tout en fumant. Sans un mot nous repartons à l'hôtel. Je suis fatiguée.

Je m'allonge dans un transat, sur la terrasse de la chambre et m'endors. 

Il est 19 heures 10. Joss me réveille doucement.

.... Alex il faut te réveiller. 

J'ouvre les yeux en m'étirant. Je cherche où je suis. Pourquoi il est là ? Qu'est-ce que je fais avec lui ? 

Je me réveille complétement et me rappelle. Il est penché sur moi, un sourire aux lèvres.

..... As-tu bien dormi ? 

Je me lève prends mes cigarettes, et en fume une. 

.... Préparons-nous ! Veux-tu descendre dîner ?  Sinon nous pouvons faire monter un plat !

.... On descend

Tout plutôt que rester là avec lui.

Je vais à la salle de bains me rafraîchir un peu. Je fouille dans mon sac, trouve mon tailleur pantalon. Je troque mon jeans contre cette tenue. Bien évidemment le pantalon est deux fois trop grand. Je retrousse la ceinture. Enfile la veste longue par-dessus. Ni vu ni connu. 

Nous descendons dîner. Jocelyn commandera des plats légers. Je mange un peu. 

Après dîner il m'entraîne dans une balade le long de la mer. Nous marchons en silence.

Nous remontons à presque 23 heures. Après une douche rapide, je vais sur la terrasse fumer deux cigarettes, rentre et m'allonge sur le lit

 La télé est allumée, c'est une émission de variétés. Il va à la salle de bains. Je m’endorme  

Le matin je me réveille sous les draps et dans ses bras, je n'ouvre pas les yeux, je cherche. Ah oui on est dans cet hôtel mais je ne sais pas où. Je sens sa bouche effleurer ma joue, je tourne la tête vers lui, il effleure ma bouche. J'ouvre les yeux il me regarde et sourit. De ce sourire chaud. Ce sourire qui fait pétiller ses yeux. Ce sourire qui creuse ses fossettes. Ce sourire que j'ai tant aimé. Toute la pression de cette demie année, vient de tomber d'un coup. 

......On se lève ma belle ?  

.... Quelle heure il est ?

..... 10 heures 40. 

...... Oh mer.... heu désolée, heu

Je me sens devenir blanche.... Les larmes piquent mes yeux. Oh non !  

..... Relax ma douce, tout va bien !

Son sourire ne l'a pas quitté.  

...... Tu dormais tellement bien, je ne voulais pas te réveiller !  

Il prend l'appareil téléphonique à côté de lui donne son nom et raccroche  

Même pas 5 minutes après, je sors des toilettes, un type avec une table ronde recouverte d'une grande nappe blanche nous amène un petit déjeuner pour au moins 10 personnes qu'il place sur la terrasse.

Pensée ......." Ils sont malades, on est que deux et je ne mange pas le matin."  

Jocelyn sert mon déjeuner, coupe une brioche en deux la tartine de confiture rouge et me la tend. Je croque dedans. Oh délice ! C'est de confiture de griottes mes papilles s'accélèrent, j'ai des frissons de plaisir.
Il m'en tartine une autre, j'en avale une bouchée. Je suis prise de nausée, je la laisse, bois un peu de jus d'orange. 

Je vais à la salle de bain, j'enfile un nouveau jeans.  Me regarde dans la glace. Je n'ai plus aucune forme. Je suis maigre et plate comme une adolescente. Même ma fille à plus de formes que moi.

Quand je sors Joss est au téléphone, sur la terrasse. Je l'entends dire, oui elle a mangé...

En l’entendant, il se retourne me fait un grand sourire ouvre son bras pour que je me colle contre lui. Au téléphone. Il dit " je te laisse mon ami bonne journée"

Je me demande à qui il parle, de qui il parle. Je laisse tomber. Il va se préparer, nous partons nous promener. 

Les jours suivants, nous nous promenons, je ré apprends à manger. Nous marchons pieds nus dans l'eau. Main dans la main. Sans vraiment parler. Sans vraiment échanger de dialogues. 
Nous faisons de belles balades. Nous nous asseyons dans le sable, lui les jambes écartées moi coulée dedans il me tient par la taille. Ma tête reposant sur sa poitrine.

Le soir tendrement il me prend dans ses bras. Sans rien dire. Sans un geste. Sans un essai, une tentative de quoi que ça soit. 

Je m'endors d'un sommeil de bébé. Juste cet effleurement de sa bouche sur la mienne. Je sais que c'est le baiser du sommeil ! 

Les jours défilent. Notre séjour en Bretagne s'est bien passé. Faut dire que je ne parle pas beaucoup, mais je suis mieux, je reprends goût à la vie

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3 juin 2001

Terminus

Je me couche en rentrant, je n'ai pratiquement pas dormi de la nuit, je suis fatiguée. 

Je me réveille vers dix-huit heures. Je vais me faire un chocolat chaud, que j'emmène dans mon salon. J'allume la chaîne hifi doucement, juste pour faire un bruit de fond.

J'essaie de rassembler mes forces, mes larmes, coulent sans que je m'en aperçoive, je renifle, je me lève chercher du papier absorbant dans la cuisine, je reviens et bois mon chocolat. Je pleure, fume clope sur clope pendant deux heures. Je vais prendre une douche fraîche et me recouche.

Le lendemain et toute la semaine, je vais travailler comme un zombie. Je demande à Marie de ne me passer aucune communication de Jocelyn

......... Qu'est ce qui se passe ?

......... On a eu une engueulade sérieuse, et moi basta j'arrête !

.......... Oh ça va passer ma chérie, comme chaque fois.

......... Non ça ne passera pas, pas cette fois-ci, je n'oublierais pas !

......... Tu n'oublieras pas quoi ?

........ Rien, laisse tomber, je te demande simplement ce service.

..... Bon d'accord

Justement le téléphone sonne, je fais signe à Marie de décrocher.

.......Salut beau Joss comment vas-tu ?

.......

...... Ah non elle n’est pas là

........

...... Ok bisous

Elle raccroche. De mon poste, je balance toutes les communications, sur le sien. Comme ça je n'ai pas à regarder qui téléphone. Il appelle sur mon portable, je laisse sonner.

Il rappellera plusieurs fois dans la semaine.  Marie répond que je ne suis pas au bureau, ou aux toilettes ou déjà partie ou pas encore arrivée ! elle finit par lui dire, que je refuse de le prendre au téléphone

Le midi je ne vais plus au self avec Marie, je n'ai pas faim. Malgré le froid de février je vais dans le jardin des Tuileries qui n'est pas loin du bureau et je bouquine, enfin j'emmène un livre, je n'arrive pas à me concentrer, je pars dans mes pensées.

Frigorifiée je rentre au bureau.

Marie ne me pose aucune question, elle voit que j'ai constamment les larmes au bord des yeux et qu'il ne faudrait pas grand-chose pour que j'éclate.

Le soir je rentre chez moi, prend une longue douche, comme pour nettoyer, laver ces coups de ceinture. Je peux dans la grande glace compter les huit coups de lanières incrustées dans ma chair

Je mange juste un yaourt, rien d'autre ne passe.

Je me mets en boule dans mon canapé. Je pleure en entendant une chanson. Je pleure quand mes pensées vont vers cette soirée. Cette pute avec son décolleté, sans soutif, a foutu ma vie en l'air, le temps d’un resto.

Je la hais. J'ai envie de lui vomir dessus, de lui écraser sa face de merde.

Elle m'a complétement démolie. Je ne dors plus, je ne mange plus. Je ne fais que fumer et pleurer. Il n'y a que mon travail qui me tient debout. Je fais des heures pas possibles, le matin je suis au bureau à 8h, quand Marie arrive, j'ai déjà fait le café, je suis au boulot depuis trois quart d'heure.

Je fume cigarette sur cigarette, j'en suis à deux paquets par jour. Le soir je quitte à 18h au lieu de 16 et demie voir 17 h. J'accumule les heures de récupération.

Mon Brandon, le directeur m'appelle

 ....... Alexandrine, j'ai vu votre compteur, ce n'est pas possible, vous êtes à trente et une heures de récupération, il faut poser des jours !

Je fonds en larmes, il me regarde étrangement, il ne comprend pas, moi la combattive, je suis un chamallow tout mou.
...... Que se passe-t-il Alexandrine ?

Je suis incapable de lui répondre. Je m'écroule dans le fauteuil devant son bureau. Il attend que je me calme

..... Monsieur Brandon, je ne veux pas prendre de jour, est ce que vous permettez que je cumule mes heures

...... Bon écoutez exceptionnellement oui ! Mais n'allez pas au-delà de 39 heures, et vous prendrez une semaine. Je crois que vous avez besoin de repos.

........ Merci Monsieur le Directeur.
On se sert la main, j'ai les larmes aux yeux, il me regarde songeur !

Je passe par les toilettes, me refaire un semblant de visage humain.

Les jours, les semaines passent. J'ai perdu quatre kilos en deux mois, j'ai les yeux hagards. Je ne vais même plus aux Tuileries le midi, je reste au bureau. Je bosse, ou je me perds dans le vide. 

Je prends la semaine de Pâques, je vais chez mes parents. Ils ne me posent pas de question, je leur dis simplement que je suis exténuée, j'ai eu beaucoup de travail au bureau. Je ne fais que dormir, aller dans le jardin et pleurer tout mon soûl. Mes parents vont chercher Choupette pour les vacances scolaires, je suis incapable de m’en occuper

Marie m'appelle deux fois pour savoir comment je vais. Le mardi dix-sept avril, je retourne travailler, après dix jours de repos. Je n'ai pas pris de poids, mais au moins je suis un peu plus reposée.

Je ralentis les heures de travail le matin j’arrive entre huit heures et demi et neuf heures. Le soir je quitte après elle, après toutes les filles. Je ne passe pas par l'entrée principale, mais par l'entrée de côté. Ça me fait un peu plus de marche pour aller chercher mon RER mais je m'en fou. Je ne rentre jamais directement de toute façon. Je me balade dans le forum. J'ai besoin de voir du monde. Il m’arrive de trainer jusqu’à vingt heures

Je prends ma longue douche, avale mon yaourt et me mets en boule dans mon canapé, la télé allumée

Je pleure moins, je fume toujours deux paquets par jour. Je ne reprends pas de poids, au contraire, j'ai encore perdu 3kgs, je flotte dans toutes mes fringues. Je pèse à peine 46 kilos

Les semaines sont réglées comme du papier à musique. Quatre mois, que je ne l’ai pas revu. Il a essayé plusieurs fois de me joindre au bureau, ou sur mon portable, j'ai mis son numéro en rejet d'appel. Il ne m'emmerde plus. 

Je ne ris plus. Je suis calme. Je ne sais pas si c'est calme. Je pense plutôt triste, abattue, meurtrie.  

Quelque chose est mort en moi. Je suis éteinte, une morte vivante.   Comme dit Marie en riant je grandis. Je vais avoir vingt-quatre ans, l’âge de raison.

Je travaillais pleine de joie, avec ma meilleure amie. J'étais heureuse même si ma vie, était un peu routinière. J'étais indépendante, je faisais ce que je voulais, quand je voulais. Je n'avais de comptes à rendre à personne, sauf à mon directeur de service bien entendu, mais là tout se passait bien, j'étais consciencieuse et j'aimais mon travail ou j’ai gravi peu à peu tous les échelons. Mais ça c’était avant. Avant que je tombe sur un pervers sadique. Avant qu’une pute démolisse ma vie

Je reste de longs moments à regarder dans le vide, fumant, buvant du café. Je règle mes journées de boulot je règle ma vie chez moi.

Je suis épuisée moralement, physiquement, psychologiquement. Mais j'essaie de remonter doucement la pente

Marie, ne pose pas de question, elle reste discrète et attend que j'aie envie de parler. Mais je ne parle pas. De toute façon qu'est-ce que je pourrais dire ? Parler de quelque chose que je ne comprends pas, parler de l’impensable ? Même pas sûre qu’elle donne du crédit à ce que je pourrais raconter

Elle me regarde souvent quand je suis penchée sur mon travail.  (Nos tables-bureaux sont en face à face)

J'ai abattu en 4 mois, un travail monstre, les filles sont contentes, elles n'ont que des paperasses à faire. J'ai épuisé tous les dossiers compliqués, les retards. Je me suis jetée à fond dans le travail pour oublier. Mon directeur est ravi !

Je pose quatre jours, avec le lundi de Pentecôte, ça me fait une semaine. J'ai besoin de repos, je sens que je vais craquer sinon. Je retournerais chez mes parents me faire dorloter un peu. Je fais signer ma feuille au directeur de service, c'est bon vendredi soir je suis en congés.

Marie rentre de déjeuner, j’ai préparé le café. 

En souriant elle me propose .......... J'ai fait des photocopies de mots croisés ça te dis ? 

.........  Oui si tu veux ! Ce soir je suis en vacances. Il n'y a pas de retard ni rien d'important, tu verras avec les filles 

....... D'accord ! Ne t'inquiète pas, pense plutôt à te reposer. Tu vas chez tes parents ?

J'opine de la tête, en souriant tristement. Le téléphone sonne, je jette un regard sur l'écran c'est Phil, je fais signe à mon amie, que c'est pour elle. 

Elle parle quelques instants, et s'adresse à moi.

...... Phil demande si tu veux venir manger à la maison ? 

..... Heu, sais pas ! 

Marie en riant parle au combiné ....... Elle ne sait pas

...............

 Marie éclate de rire ……. Ok chéri à ce soir

Elle raccroche. ....... Bon allez ce soir tu viens manger, tu coucheras à la maison et Phil t'accompagnera chez tes parents 

..... Merci 

Je me plonge dans ma grille de mots croisés, je ne vois même pas les cases, je suis ailleurs. Je bois mon énième café allume ma énième cigarette. Essaie de me concentrer sur les mots à chercher 

..... Marie, je ne sais pas si je vais venir ce soir ! 

......... Ah ! Et pourquoi ma chérie ? 

........ Je ne suis pas en forme ! 

..... C'est le moins qu'on puisse dire. Veux-tu parler ? 

Je fais signe que non de la tête, elle n'insiste pas, et dit simplement .......... Tu sais Phil se demande pourquoi on ne t'a pas vu depuis pratiquement cinq mois. Il va se vexer s’il ne voit pas son petit rayon de soleil.

Elle me sourit en fixant mon regard. Je la regarde sans la voir. Je ne pleure plus depuis longtemps, j'ai épuisé le stock.

Je me replonge dans ma grille de mots croisés.

Pensée ...... " Tu parles d'un rayon de soleil, il est un peu éteint. "

Je sais qu'elle me regarde et qu'elle se pose des questions, mais je n'ai pas envie d'en parler ! Parler de quoi ? Comment expliquer l'inconcevable ?  

A 16 heures, Marie me sort de ma torpeur ............. On y va ma chérie, j'ai dit à Phil qu'on n'arriverait pas trop tard.  

Je ramasse mes affaires, et la suis comme le zombie que je suis devenue. Dans mon jeans trop grand, j'ai l'air d'une évadée de Dachau. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même.  

On arrive chez Marie, elle ouvre la porte et en riant.  ...... Il y a quelqu'un dans cette maison ? 

Phil...... Nous sommes au salon, chérie.  

Mon cœur s'arrête. Je me sens devenir livide. Je fais demi-tour, ouvre la porte pour partir. Marie me rattrape par le bras. D'un coup sec, je me dégage. Je dévale les escaliers. Phil me rattrape alors que je m'apprête à sortir sur le trottoir. Il me prend dans ses bras. Je suis figée, livide. Au bord du malaise. 

Il essaie de m’entrainer. Je me débats, et deviens hystérique. Il me maintient fermement.
Sur le trottoir dans les bras l’un de l’autre, il attend que je me calme Il me dit des mots apaisants.

Nous remontons. Marie nous attend dans l'entrée de l'appartement. Phil embrasse sa femme, et me reprend dans ses bras en me disant. ……. Allez petit chat, ça va aller, nous sommes là !

Je le regarde d’un air d’abrutie qui ne comprend pas. Je n'arrive pas à parler, j'ai du mal à déglutir, les jambes en coton.  

En nous prenant Marie et moi par les épaules, chacune d'un côté il nous emmène dans la salle à manger-salon. Jocelyn est là, debout. Je le trouve un peu pâle, un peu amaigri. Mon cœur fait un bond, de le voir là, j'ai envie de prendre mes jambes à mon cou, de sauter par la fenêtre. 

...... Voilà poto, je suis un homme heureux ce soir, j'ai les deux femmes de ma vie ! 

...........Oh ! Oh ! Alex tu m'en caches des choses ! 

Je réponds d'un ton épuisé. Dans un souffle comme si c'était le dernier que je poussais.  .... Non Rien !

Phil nous libère. Pendant cet échange, Joss, me regarde, avec son sourire que j'aimais tant. Nos regards se croisent et je me dis, oh putain comment a-t-il pu ? Pourquoi ? 

Ces larmes qui ne coulaient plus, je les sens monter.

" Non ne pleure pas, ne lui donne pas cette joie ! "

Je ravale mon sanglot dans ma gorge et respire à fond. Il embrasse Marie, lui demande comment elle va.

...... Moi ça va ! Ça va toujours, ce n'est pas le cas de tout le monde. 

Jocelyn me prend dans ses bras. Son geste est tendre, il m'embrasse. Je suis tendue. Je ne réponds pas à ses baisers. J'ai l'impression que je vais m’évanouir. Il me prend la main et m'entraîne sur le canapé. Je me dégage et m'assois dans le fauteuil. Je ne veux pas qu'il me touche.

Phil et Marie ont vu mon geste, mais n'ont rien dit. 

Tout le temps de l'apéro, je sais qu'il me regarde. Qu'il me dévisage, me détaille. Je ne tourne pas la tête, je ne le regarde pas, je ne lui cause pas. D'ailleurs je ne participe pas à leurs débats. Je suis ailleurs. Perdue dans mes pensées. Perdue dans rien, je suis dans le néant. Dans cet abîme ou je n'arrive pas à remonter. 

Je fume, clope sur clope. Je bois un peu du martini que Marie, m'a servi. Ça me soulève l’estomac. Je laisse mon verre. Phil veut pour remettre une tournée voit mon verre plein 

...... Bah alors mon p'ti chat, tu ne bois pas ? Tu n'aimes plus mon martini ? 

.... Non je préfère un verre d'eau s'il te plaît 

Marie se lève, ramène une bouteille d'eau et un verre, qu'elle me tend. Je les prends d'un geste las. Je me sers, pose la bouteille par terre à côté de moi et rallume une cigarette. 

Je ne participe que très peu à la conversation du repas. Les trois discutent, sourient. Quelques rires éclatent.

J'ai l'impression d'être dans un hall de gare, j'ai mal à la tête. Le repas se termine enfin. Marie me demande si je veux dormir là, je regarde Phil.

......Oui dors là mon p'ti chat je ne vais pas te ramener maintenant il est minuit bientôt. 

....... Alors je vais me coucher !

Sur le pas de la porte je dis simplement " Bonsoir"

Marie me suit pour me donner une tenue pour dormir.  

...... Bonsoir p'ti chat 

...... Bonsoir ma belle 

Je me déshabille machinalement, et me glisse dans le lit de Laurence. Je voudrais m'endormir vite, mais je sens les larmes qui coulent toutes seules, et je ne peux pas les arrêter. J'enfouis ma tête dans l'oreiller. Je geins comme une bête blessée.

J'ai entendu Joss partir. Mes amis se coucher à leur tour. Quand toute la maison a été calme je me suis relevée fumer J'ai passé ma nuit à pleurer et fumer, à essayer de comprendre.

Je cherche où je suis. Ah oui ! Dans la chambre de Laurence. Je me lève, enfile la robe de chambre que Marie a posé sur la chaise. Marie et Phil sont dans le salon en train de discuter tout bas. 

Phil demande en regardant ma tête de déterrée…...... Bonjour mon p'ti chat tu as bien dormi ?

..... Oui merci, quelle heure il est ? 

........10h 20

.......Pourquoi vous ne m'avez pas réveillée 

Marie. ...... Je pense que tu avais besoin de dormir.

Elle se lève et sort de la pièce 

Phil. ...... Alors comment tu vas mon p'ti rayon de soleil ? 

...... Bien merci ! 

Phil éclate de rire....

 .... Et tu veux faire croire ça à qui ? 

Marie revient avec un grand bol de café au lait qu'elle me tend, je la regarde connement. Réagis et la remercie. J'allume ma clope la première du matin. Avant même de boire une gorgée de café. 

........ Je vais me préparer. 

Marie. ...... Oui vas-y je t'ai mis du linge propre.

 ......... Merci.
De mon pas trainant. Je vais à la douche, je laisse l'eau couler sur mon corps, mes larmes sur mes joues. Je m'habille et vais faire le lit. 

Je rejoins Marie dans la cuisine, qui est en train de se battre avec un poulet et la broche du four, J'entends Phil au tél 

..... Oh Alex tu tombes bien, je me bagarre avec cette saloperie de volaille qui ne veut pas se faire embrocher 

Je souris tristement. Bloque la broche sur mon estomac, prend le poulet des mains de Marie et l'enfourche 

.........Alex 

....... Oui ? 

...... Ça fait au moins quatre mois que je ne t'avais pas vu sourire ! 

J'ai les larmes qui arrivent, Marie le voit, elle me prend dans ses bras, me demande si je veux un café ? 

J'acquiesce et m'assois à la table de la cuisine, j'allume une cigarette. Marie me tend un morceau de papier absorbant pour que je me mouche. Les larmes coulent sans que je puisse les arrêter. Je bois mon café et finis par me calmer. 

‘’Oh ! Merde. Je ne pleurais plus. J'avais séché mes larmes une bonne fois pour toute. Pourquoi ça recommence ?’’

....... On n’est pas au bureau ici ma chérie, veux-tu parler de quelque chose ?

Je fais non de la tête, elle n'insiste pas 

........ Tu vas chez tes parents lundi ? 

....... Oui 

..... Tu verras tes frères ? 

 ..... Oui, j’espère

On continue de parler tranquillement. .... Quand la sonnette retentit, Phil va ouvrir, j'entends qu'il embrasse quelqu'un 

........ C'est Laurence ? 

Marie me sourit et n'a pas le temps de répondre, je sens deux bras qui enlace ma taille, je me retourne. On m'effleure les lèvres. Je reconnais l’odeur de l’eau de toilette, je me dégage d'un mouvement brusque, Il embrasse Marie 

Phil sert l'apéro, je n'en veux pas, je préfère fumer comme un pompier. Le repas me parait être une éternité. Je ne prends pas aux conversations. 

Jocelyn est en face de moi, il ne me quitte pratiquement pas des yeux. Je chipote dans mon assiette, je n'ai pas faim. Jamais je n’aurai dû venir. Je voudrais être chez moi, seule, au calme.

Après manger, Phil propose une balade.  

Jocelyn d’un ton enjoué répond ......... Pourquoi pas, il fait bon dehors, ça te dit ma douce ? 

Je hausse les épaules en ayant l'air de dire je m'en fou, je suivrais 

Phil...... Bon bah ok alors ! 

Marie qui n'a rien dit jusqu'à là ........ Oh allez-y ! Je n'ai pas envie de bouger 

Phil....... Ah bon ? Bah je reste avec toi chérie !

Et regardant Joss..........Va faire un tour avec Alex, elle veut bien ! 

Je regarde tour à tour Phil et Marie, en leur faisant comprendre que j'ai bien vu leur manège. Je les assassine du regard 

Je prends ma veste quand Joss vient m'aider à l'enfiler et me prend la main. Direct je me dégage et mets mes mains dans mes poches. Il est à peine 16 h 

Joss ........ A tout à l'heure mes amis ! 

.......  Allez va frelot, prends ton temps !
Je ne m'attarde pas sur la réponse de Philippe. Nous sommes sur le palier. Joss va pour mettre sur mes épaules. Je m'écarte. Nous allons à sa voiture. Il ouvre la portière que je puisse m'installer. 

En montant en voiture, je respire l'odeur. Je ne me rappelais plus. Le parfum de Joss se mélangeant à l'odeur des sièges en cuir. Il monte à son tour, enclenche la clé dans le contact, et se tourne vers moi 

 ....... Où veux-tu aller ma douce ? 

........  Aucune importance

Je fixe devant moi, j'ai le regard dans le vide, le cerveau au ralenti, le cœur qui bat à tout rompre, les mains glacées malgré la douceur printanière de cette belle journée. 

...... Veux-tu que nous allions chez moi discuter un peu ? 

Je ne réponds pas, hausse les épaules, l'air de dire, je m'en tape ! 

Nous arrivons chez lui. Dans son entrée, il m''aide à quitter ma veste, enlève la sienne et m'entraine au salon. Il retourne dans la cuisine, revient avec une carafe, et me sert un verre. 

Je bois j'ai la gorge sèche, c'est de l'eau légèrement citronnée. Il s'installe à côté de moi, passe son bras au-dessus de mes épaules et m'attire vers lui. Je me laisse faire, je suis sans force. Il ne dit rien, je ne bouge pas pendant cinq bonnes minutes. 

........ Tu veux parler de quoi ma douce ? 

...... Heu ché pas 

...... Tu as pris quelques jours de vacances ? 

..... Heu... oui

 .... Que vas-tu faire de beau ? 

...... Heu. ..... Mes parents 

..... Toute la semaine ? 

..... Oui 

...... Il y aura tes frères ? 

....  Heu .......ché pas 

Nous continuons comme ça pendant plus de deux heures. Je suis raide, fatiguée, vidée. Mon pouls s'est régularisé. Mais je reste tendue, angoissée. Je regarde l'heure à l'appareil sous la télé, je vois 18h 57, je me dis merde il ne me ramène pas chez Marie

........ Je veux rentrer chez Marie 

....... J'ai une meilleure idée, veux-tu que nous allions au restaurant ? 

Non je n’ai pas envie d’aller au resto, pas avec lui. Déjà je ne mange pas beaucoup, ce midi le tout petit bout de blanc de poulet m'a gavé. Je ne me vois pas aller au resto. Je fais non de la tête. 

... Nous pourrions discuter un peu, dans un endroit neutre, qu'en penses-tu ? 

Jocelyn se lève. Je l'entends téléphoner, il n'a pas fermé la porte de son bureau. Je ne comprends pas ce qu'il dit. Il revient 

..... Ne t'inquiète pas, j'ai prévenu Philippe et Marie 

J'écrase ma cigarette et me lève, je vais enfiler ma veste.

Je marche comme dans un brouillard, je suis là sans être là. Les mains dans les poches de ma veste, j'avance par automatisme. Sans penser à rien.  

Joss m'emmène dans un restaurant russe près des Champs Elysées. Il y a trois musiciens qui jouent du violon, l'ambiance est chaleureuse. Il fait bon. Je me détends un peu. Tout en étant sur le qui-vive.

Cette peur qu'il essaie de m'approcher, qu’il me touche, qu’il aborde un sujet qui ne me plaira pas.

..... Veux-tu un apéritif ma douce ?   

Je fais non de la tête.

Un serveur nous amène les menus, Jocelyn en profite pour commander un whisky et un jus de fruits 

Il prend ma main au-dessus de la table, il croise ses doigts entre les miens, et me regarde profondément. Je ne baisse pas les yeux. La lumière est tamisée nous sommes dans une petite alcôve. Je ne risque rien, il ne pourra pas déceler ce que je pense. 

....... Es-tu bien ma douce ? 

....... Arrête de m'appeler comme ça ! 

.....  D'accord mais il va bien falloir que l'on discute tous les deux ! 

A ces mots je me raidis. Heureusement le serveur nous apporte nos verres. J'enlève ma main de la sienne. Il commande nos plats 

....... Alex, que se passe-t-il ? 

Il demande qu'est ce qui se passe ! Mais il est dingue ou quoi, il a perdu la mémoire ? il est pris d'amnésie depuis février ? Il se réveille d'un coma et ne sait plus ce qui s'est passé ? Il a tout effacé de son circuit imprimé. Mais ce n'est pas possible !

..... Rien !

....... Tu vas dormir à la maison et demain nous discuterons d'accord ?

Je fais non de la tête. Un flot de larmes s'échappe de mes yeux. J'essaie de le ravaler, trop tard il l'a vu ! Il plonge son regard dans le mien.  Il n'y verra rien. Mon regard est éteint.

Je ne sais même pas ce que je mange. Les musiciens jouent de la belle musique. Je suis comme dans du coton. Je flotte dans l'air ambiant.
Le repas se passe sans grande conversation.  Jocelyn me pose quelques questions, je réponds par oui----- non---- ché pas. 

Je suis complétement bloquée, je n'arrive pas à articulée. Je n'arrive pas à déglutir. Mes plats repartent à peine entamés. Le repas est enfin terminé, nous restons un peu écouter la musique 

....... Veux-tu y aller ?  

..... Oui 

Il se lève m'aide à enfiler ma veste, nous sortons dans l'air tiède de ce début d'été. Jocelyn tient ma main, les doigts entrecroisés dans les miens. Je n'ai même pas la force d'enlever ma main de la sienne ! Nous rentrons chez lui. 

......  Veux-tu boire quelque chose ? 

..... Non 

.... Veux-tu aller dormir ?  

..... Oui chez Marie. 

Il me prend dans ses bras, me berce un peu, on est là au milieu du couloir, il se penche effleure mon front en murmurant

...... Il se fait tard, ma douce. Dors ici. Nous parlerons demain. Et je t'emmènerais chez nos amis, promis.

Je me dégage de ses bras. Je n'ai pas envie de batailler. Je vais à la salle de bains. Je retrouve mes affaires, telles que je les ai laissées. Mes larmes débordent de mes yeux, je ne peux plus m'arrêter, je vais me coucher comme ça.

Je pleure un bon moment, me relève pour fumer. Je m'endors épuisée.

Je me réveille, il est déjà 9 h 27, je mets mes mains sous ma tête, et essaie de rassembler mes pensées. Je vais bien être obligée de me lever. Pourquoi est-ce que j'ai accepté cette soi-disant balade hier ?

En fait c'était un piège cette invitation, Ils ont fait exprès de nous inviter ensemble, s’ils pensent que ça changera quelque chose, bah ils se mettent le doigt dans l'œil bien profond. Fini ! C'est fini ! Et bien fini ! 

Je ne reviendrais pas sur ma décision. J'ai eu trop mal, beaucoup trop mal. Bien sûr j'ai eu mal par les coups de ceinture, mais le pire, c'est la douleur intérieure, cette douleur lancinante, en me demandant pourquoi, sans jamais avoir la réponse !

Chaque jour, je voyais les marques incrustées dans ma chair, les hématomes me rappelant cette soirée 

Bon allez faut que je me lève, je me décide enfin, et me dirige vers la cuisine boire un café.  Jocelyn est dans son bureau la porte ouverte. Dès qu'il me voit dans le couloir, il vient à ma rencontre me prend dans ses bras et me tient contre lui. Je respire son odeur. Je ne bouge pas, telle une statue je reste figée. Mon pouls s'emballe. De colère, de hargne, de rage contre lui. Lui qui a détruit ma vie pour une salope !

........ As-tu dormi un peu ma belle ?

Il m'emmène dans la cuisine, me fait asseoir, j'ai les yeux dans le vide. Je ne pense à rien. Il met devant moi un grand bol de café au lait et sort. A son retour je suis en train de fumer. Il se sert un café, s'installe en face de moi, met ses coudes sur la table, croise ses mains, et pose son menton dessus. Il me fixe, j'ai les yeux baissés, avec ma cigarette je joue dans la cendre du cendrier.

......... Je t'ai fait couler un bain, tu iras te détendre 

Je ne réponds pas, tire sur ma cigarette sans lever les yeux

........ Ne veux-tu vraiment pas me parler ?

Je ne sais même pas quoi lui répondre. J'écrase mon mégot et rallume une cigarette. J'inhale la fumée et recommence à tourner la cendre dans le cendrier avec le bout de ma cigarette.

....... N'aurons-nous donc pas d'explications ?

Je m’évade, j’ai décidé de ne pas parler.

.... Alex........ Il m'appelle doucement de cette voix chaude que j'aimais tant. Je suis totalement dans le cosmos. Là-haut dans mon cerveau, toutes les lumières sont éteintes. Je n'imprime plus

...... Alex, ma douce, réponds-moi !

Il parle de cette même voix, tranquille. Mes larmes coulent sur la table sans que je m'en aperçoive.

Je relève la tête croise son regard. Je vois ses petites étoiles danser. Il m'emmène dans la salle de bains, éteint les robinets 

...... Détends-toi, prends ton temps, je t 'emmènerais après chez nos amis.

Il ferme la porte derrière lui. Mon regard croise mon image dans l'immense miroir qui prend tout un mur. Je me fais peur. Je suis tellement maigre. Mes yeux mangent ma figure, je suis d’une pâleur extrême.  Je n'ai plus de cuisse, plus de poitrine. Je me déshabille, plonge dans le bain tout moussant. Il a mis la balnéo en route.

Je m'allonge pose ma tête sur le repose-tête. Mes pensées repartent sur cette horrible soirée.

A cause d'une pute j'ai pris des coups de ceinture. Oh comment je peux la haïr, moi qui ne connaissais même pas ce sentiment.

Bien sûr je m'énerve vite, on dit que je suis soupe au lait. J'éclate en colère, et ça passe aussi sec, je ne suis pas rancunière. Je n'étais pas rancunière. Tient encore un nouveau sentiment que je ne connaissais pas.

Je ne dois surtout pas me laisser avoir par sa voix chaude, par ses paroles douces. Parce qu'il me prend dans ses bras et qu'il me berce, comme au bon vieux temps, quand nous étions les meilleurs amis du monde. Nous ne le sommes plus. C'est fini. Il a tué en moi les sentiments que je lui portais.

Terminé, il ne m'aura plus. Il en prendra une autre. Une qui accepte de se faire malmener pour un resto, pour une balade, un ciné. 

Je n'ai pas besoin de lui. Je ne ressens plus la nécessité d'être avec lui, j'ai organisé ma vie sans lui.

Je m'aperçois d'un coup que depuis que je suis dans le bain je pleure. C'est ce soubresaut qui me fait réaliser que mes larmes coulent encore. Elles n'ont que trop coulées, je n'ai que trop pleuré pour ce connard, pour cette garce.

Je m'enroule d'une grande serviette, et vais dans ma chambre, j'ai un peu de petit linge.  Je m'habille, retourne dans la salle de bain finir ma toilette et me donner un coup de brosse dans les cheveux. Je vide le bain, le rince, étends la serviette sur le sèche-serviette et sors. Je fais tout ça machinalement, mécaniquement.

Je vais dans la cuisine ? Au salon, ou je retourne dans la chambre ? Je ne sais même pas quoi faire !

Il est dans son bureau la porte ouverte, au téléphone. Il me fait signe d'approcher, j'avance doucement, mes pas sont lourds, ma démarche épuisée. Putain de toi tu n'as même pas l'âge de ta mère et tu ressembles à ton arrière-grand-mère !

Je suis là devant sa table de travail, les bras ballants. Je le fixe sans le voir. Avec le téléphone dans la main, il quitte son fauteuil, prend ma main et me fait asseoir sur une des chaises qui font face à son bureau. Il s'assoit sur l'autre  

Au téléphone il fait ....... Hum, oui bien sûr.... Hum, hum !

Comme ça pendant quelques instants. Il repose le téléphone sur son socle.

........ Ça t'a fait du bien le bain ?

...... Oui

...... Veux-tu boire quelque chose ? 

.......   Ché pas

..... Veux-tu un café ? 

..... Heu...oui

Je parle d'un ton las, épuisé. J'ai l'impression d'avoir 100 ans

Il m'emmène dans le salon, me fait mettre sur le canapé. Va à la cuisine chercher une grande tasse de café qu'il me tend. Je regarde cette tasse devant moi. Enfin je réalise que c'est pour moi, je la prends et commence à boire. Le café est bien chaud, je le sens descendre le long de ma gorge, une douce chaleur m'envahit.
Joss se met à côté de moi. Il ne bouge pas, ne parle pas, je pose ma tasse sur la petite table et allume une cigarette.

....... Ma douce, nous allons discuter, il faut crever l’abcès !

Je l'entends loin, dans un brouillard. Je ne sais même pas si c'est à moi qu'il s'adresse. Je suis au filtre de ma cigarette, je le jette dans le cendrier et en reprend une dans mon paquet. La main de Joss arrête mon geste.

 .......  Non tu n'en rallume pas, ma douce, ça suffit tu ne fais que fumer !

Le ton n'est pas autoritaire, non, il est doux, tendre. Il prend la cigarette que je voulais allumer, je tourne la tête, et là je le regarde. Non ! Je le fusille. Lui me sourit. Il me prend dans ses bras, je me dégage. Je me réveille de ma torpeur.

...... Laisse-moi fumer ! Tu n'as aucun droit sur moi !

....... Oui je vais te laisser fumer quand nous aurons discuté !

....... Je n'ai pas envie. Je n’ai rien à te dire !

...... Ne veux-tu pas que l'on en parle ?

Je ne réponds pas, je me mets en boule sur le canapé. J'attache mon regard sur le fauteuil d'en face. Je ne bouge plus.

....... Alex, tu ne peux pas continuer à garder ce que tu as sur le cœur sans en parler

...... Je n'ai rien à dire.

Joss ....... Alex, il faut en parler, vider ton sac !

Il pousse un soupir. De sa main derrière ma tête, il m'oblige à lui faire face. Mon regard est vide, le sien triste. Je m'en moque. Qu'il aille se faire foutre

J'ai envie de rentrer chez Marie, ou chez moi. De me retrouver sur un terrain neutre, plus sûr. Je n'ai pas envie d'entamer une discussion avec lui, qui de toute façon ne servira à rien. Et finira mal pour moi !

....... Parle-moi ma belle, ne reste pas enfermée dans ta bulle.

Je me dégage de ses mains, attrape mon paquet de cigarettes et sans m’occuper de lui, j’en allume une. Il ne bouge pas. Me laisse fumer. Ma cigarette finie, il prend mes mains dans les siennes

 .... Alex, dis-moi quelque chose

Son ton est presque suppliant. Je le regarde droit dans les yeux. Je l'observe, l'épie, guette le moindre mouvement de son visage. Je sais que je suis livide. Translucide même. Je retire une fois de plus mes mains.

Et là c'est comme un déclic, ces quatre mois et demi ou je n'ai rien dit, tous ces longs mois ou j'ai gardé ma souffrance, ou j’ai versé tant de larmes.

Ces presque cinq mois-là vont exploser en éclats. Arrivera ce qui arrivera, je m'en fou. Je n'y pense même pas. Je lâche tout d'un bloc

D'une voix ou gronde la colère. D'une voix qui va aller crescendo.  D'une voix qui va littéralement exploser

...... Tu veux parler de quoi ? de cette salope qui a foutu ma vie en l'air en deux heures de resto ? Tu veux parler, de la soirée de merde qu'elle m'a fait passer. Qu'elle n'a pas lâcher le morceau, jusqu'à ce que j'explose. Tu veux parler de ta propre colère ? Des coups de ceinture ? Tu veux parler de la façon que tu me traites, de ta soi-disant amitié ? Tu veux parler de ta recherche d'une femme qui est assez conne pour se laisser maltraiter. De ton sadisme, à vouloir à tout prix faire mal pour un mot de travers. Tu veux parler de l'état dans lequel tu m'as rendu. Tu veux parler de quoi encore hein ? Alors tu veux parler de quoi !

Et là je hurle pratiquement. Je m'arrête à bout de souffle, mes larmes coulent encore et encore. Je pleure à gros sanglots

Il me prend dans ses bras, me berce comme un bébé. De sa voix chaude, me demande pardon, me disant qu'il ne sait pas ce qui lui a pris, qu'il s'est vu des années en arrière ou ses amis se faisaient malmenés par son ex. Qu'il ne s'est pas contrôlé. Qu'il n'a pas dormi cette nuit- là, qu'il m'a entendu. Il a parlé, a expliqué.

Je me suis calée dans ses bras et me suis endormie. 

Je sens sur ma joue, un doigt qui me caresse. Oh cette sensation de bien-être, enfin je suis au paradis. Je suis bien. Je suis merveilleusement détendue. 

 .....  Ma douce, Phil et Marie nous attendent pour déjeuner

J'ouvre les yeux, oh bah c'était un rêve. Je regarde autour de moi, et je me vois la tête en bas. En fait je suis allongée sur le canapé, la tête posée sur les cuisses de Jocelyn. Je me demande ce que je fais comme ça. Je me relève d’un bond, croise son regard, il me sourit, je me sens pâlir, il m'attire contre lui et m'embrasse dans les cheveux, je me dégage.

...... Ça va ma douce ?

....... Oui

 ...... Tu es fatiguée, tes vacances te feront du bien ! On y va ?

Je me lève précipitamment.

Phil sert l'apéro, je suis assise dans le canapé, Jocelyn à côté de moi, croise ses doigts dans les miens, avec rage je lui enlève et m’écarte. Je ne veux pas qu’il me touche, qu’il m’approche Je n'ai pas envie de me battre. Je n'ai plus les forces pour ça

Oui on a discuté, enfin plutôt il a discuté, il s'est excusé, il était malheureux. Je l’ai laissé parler sans l’interrompre, écoutant à moitié ses explications. Mais je ne peux pas pardonner. 

Enfin, j'arriverais peut-être à pardonner, mais je ne pourrais pas oublier, non, je n'oublierai jamais ! 

Nous deux, ça ne sera plus jamais comme avant, c'est gravé dans ma tête dans mon cœur à l'encre indélébile ineffaçable. Marqué comme une pierre blanche. L'aversion de cette soirée est à jamais incrustée dans mon âme, dans ma chair.  

Nous mangeons, je chipote, Phil me regarde, l'air contrarié. Jocelyn me regarde l'air malheureux. Je ne m'occupe pas d'eux. Je joue avec les petits pois qu'il y a dans mon assiette, je n'arrive pas à avaler, j'ai une boule qui coince ma gorge 

L'après-midi, Philippe propose une balade. D’emblée je dis non. Ils restent à discuter de tout de rien des futures vacances qui approchent.  

Phil parle nos regards se croisent. Il me sourit. Je ne comprends pas que c'est à moi qu'il s'adresse. Avec sa main il me fait coucou.  Je redescends sur terre 

.......Quoi ?  

..... Dis mon p'tit chat tu viens avec nous en vacances cet été ? 

Je fais non de la tête

...... Ça te fera du bien

Je fais non de la tête

Phil laisse tomber, se sentant impuissant. Vers 17 heures Jocelyn me demande si je veux qu'il me raccompagne.
..........Non ! 

Je ne sais plus rien. Je ne sais plus sur quelle planète je suis. Ce que je sais c'est que je suis anéantie. Je pensais aller mieux et je m'aperçois qu'il n'en est rien. La dépression couve, elle est encore là. Je suis brisée moralement et physiquement 

Il me raccompagne jusqu'à ma porte, m'embrasse en me serrant dans ses bras. Je ne réponds pas à ses baisers. Je reste figée. Je ne le fais pas entrer. 
J'ouvre et referme ma porte. J'ai entendu sa voiture redémarrer quelques minutes plus tard.
Je me mets en pyjama. M'installe devant la télé en boule sur le canapé. Mes larmes que je n'avais plus fait couler depuis longtemps, sont de retour. Elles roulent toutes seules sur mes joues. De l'avoir revu, me rejette dans cette horrible soirée. Malgré ses explications, je n'arrive pas à comprendre. Je passerai ma nuit à pleurer et fumer.

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